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Version du 6 novembre 2011 à 03:01
RENNES D'HISTOIRE ET DE SOUVENIRS
Mes souvenirs sont de Rennes Où je suis né par bonne aubaine Il y a des années par dizaines.
En cette ville toujours mienne, Entre Vilaine et Ille et Rance Sont ici mes souvenirs d’enfance. [1]
Sur tes coteaux avec plaisir, Tu te replias avec peine Devant des barbares peu amènes.
Que tu sois née gauloise ou celte, Tu fus romaine, monnaies l’attestent. [2] De briques et schistes tu construisis De rouges remparts de survie. [3]
On ne voit plus de tes remparts Que ta gironde tour Duchesne[4] Près de quelques briques romaines
Gourvan, plutôt que de se rendre, Mourant, triompha des Normands, Et les repoussa fermement. [5]
Ville de rien, ville de catins Ville de rapines, de malins, Le jeune Marbode en langue latine Te cassa des mots sur l’échine. [6]
Dit qu'on vivait bien ici, A cette époque même où Marbode Commettait sa vilaine ode.
Mais ne put jamais s’introduire Car Notre Dame fit un signe De son doigt désignant la mine. [7]
A leurs Portes Mordelaises, Les Rennais, de l'armée anglaise, tirèrent cochons de grand profit En suspendant une truie. [8]
Pour de Bretagne être duchesse, De voir ses Rennais en liesse La jeune Anne fut bien aise,[9] Passant les Portes Mordelaises.[10]
Tu offres tes clés et tes coeurs Au roi Henri le quatrième Qui désire tant que tu l'aimes. [11]
Levés, des Rennais furent livrés Nombreux à mille et un tourments Et mis à Vannes ton parlement.[12]
Rapporte-t-on, vivaient à l'aise Dans tes logis humides et sales, L'écurie donnant sur la salle.[13]
En te prenant huit cents logis. Deux cent soixante quatorze après L’incendie prenait ton palais. [15]
Avaient fait place nette au granit. Deux places tu t’offris royales Pour ton hôtel, ton présidial.
Certains répètent ce que l'on dit : A Rennes, rien ne prend, sauf le feu[16] Et pourtant ils y vivent heureux.
Et aux idées de liberté Des villes tu fus première Cité révolutionnaire.[17]
Réunis à la Mabilais, Ils signèrent un traité de paix, Chefs des Chouans et chefs des Bleus Mais, hélas, la paix fit long feu.[18]
Pour défaut de citoyenneté, Sur ta place de l'Egalité,[19] Sous le rasoir égalitaire, Plus de trois cents têtes tombèrent
Tailleur brave, Jean Leperdit [20] Justement célèbre se rendit Pour avoir du cruel Carrier[21] froissé la liste de papier.
Révoltés pour la liberté, Furent tués à Paris dans la rue Deux jeunes Rennais : Vanneau, Papu.
Ton opéra, plein d’embonpoint, Son ventre rond propose en vain Aux courbes graciles, au campanile De ton gracieux hôtel de ville.[22]
A trois ordres, monumentales, Se dressent en granit, souveraines Au-dessus de voûtes romaines.[23]
Des commères restant bavarder, De bonnes histoires se disant Et parfois même médisant.
Battant depuis le matin, Les lavandières éreintées, Aux bateaux-lavoirs papotaient.[25]
Tu vis la fin de grands travaux Entrepris par monts et par vaux, De la Rance à l'Ille reliant l'eau, Te donnant comme port Saint-Malo.
D'enlacer tes parties trop basses De ses bras nauséabonds, En canal droit avec beaux ponts.
Tu t’es fendue d’une ligne de quais Au long desquels tu fais la fière Comme si tu étais port de mer.[27]
Triste, t'esquintant à loisir, Et les guides de voyage De les copier dans leurs pages.
Mais de médire il est très vain. Il défend sa ville tel un tigre Et aussitôt il la dénigre.
De le vouloir en ville haute Qu'au sud, loin de l'autre rive, On décide que le train arrive.
Tous les Rennais sont de la fête, Délaissant un temps leurs affaires Car voici le chemin de fer. [28]
Celles condamnées à des peines Et nombre des incarcérées Rêvent de train, de voies ferrées.
la Vilaine fit un tour vilain, Inondant plus de quatre cents Tristes logis de pauvres gens.[29]
Tu reçus François Premier,[32] Félix Faure, de Mac-Mahon,[33] [34] Le troisième Napoléon.[35]
Fut choisi siège du procès [36] D’honneur terni du capitaine Sali par le complot de haine.
Parti défendre la patrie, Pantalons rouges allèrent au feu, Puis ce furent les capotes bleues.
Tués à la grande boucherie, Tombés nombreux aux champs d'horreur, Tes fils sont aux tableaux d'honneur.[38]
Elle fut détruite à grand éclat La Bretagne s'agenouillant Heurtant des Bretons trop bouillants.[39]
Ou le quarante et unième, Fête des fleurs, dans cette ville C'était tu regardes ou défiles.
Au Thabor les enfants se jouaient [40] Du garde manchot claudiquant [41] Portant sifflet entre ses dents.
Ferraillaient, brinquebalaient Sur les rails luisants et froids De la mairie jusqu’aux octrois.
Portant fier son sobriquet, Cloche sonnant, ton tortillard Tanguait, ahanait vers Fouillard.[43]
Passèrent trois oiseaux de malheur, Lâchant sur tes voies de triage Les fientes d'un grand carnage.[44]
Nos trois couleurs plus de mise, Hommes résédas et souris grises Le lendemain furent dans tes rues. La Marseillaise s’était tue.[45]
Marcel Brossier fut fusillé, Et l'avis d'exécution Lu avec consternation.[46]
En mille neuf cent quarante deux, A la butte de la Maltière, Les vingt-cinq résistants fiers.[47]
Aux bombes mortelles tu eus droit, Et encore l'année suivante [50] Où cessa cette tourmente.
Avenue Janvier, rue Saint-Hélier,[51] Les bombardiers avaient laissé Des tas de ruines, des trous béants[52] [53] Pour tout logis aux habitants.
Vers de germaniques horizons, Les vrais résistants qu'ils étaient Manquèrent de peu la liberté.[54]
Les Allemands mis en déroute, Tu fêtas les Américains,[55] Prête à de joyeux lendemains.
Peu à peu tu as rebâti Puis en périphérie construit Aux arrivants de grands ensembles Qui leur plaisaient fort, ce me semble.
De ta vigueur si bénéfique Profitèrent en facilitant l'accuei de nouveaux habitants.
Elèves de Coêtquidan, De ton régiments les recrues Battaient le pavé de tes rues.
Furent tranformés en quartiers, Remplaçant les casernements Pour accueillir des habitants.
Au fil des rues tu alignes Immeubles de toutes origines. Cà et là crèvent ton plafond Un Eperon, des Horizons.[58]
Fut assidu pendant huit ans Au collège à tuiles toscanes Pour du bac avoir la peau d’âne.
Entraient en fac les étudiants, Avocats, juges de demain Dans cette ville pleine de robins.
Ici commence ma vie d'après la Kabylie et ses djebels, Vilaine, je te trouve belle. [60]
Rue d’Estrées et rue Le Bastard,[61] Le soir venu jusque fort tard Brûlaient, lueurs aguicheuses, Cent enseignes lumineuses.
À huit cents ou mille assemblés Les Rennais en leurs salles obscures [62] Savouraient Blanche-Neige, Ben Hur.
Et les pizzerias affluent. Crêperies et galettes-saucisses Font toujours encore nos délices.[63]
Les parcourant de haut en bas[64] Afin de remplir leurs cabas Les Rennais se retrouvent aux Lices Le samedi, jour des délices. [65]
Au beau stade, route de Lorient Pour soutenir onze rouge et noir [66] En espérant bien la victoire.
Au Champ de Mars tu rassemblais Outre Rennais, ruraux en noir Venus visiter ta foire.
Poussaient tranquilles des pommiers De tes lignes de productions Sortent les voitures aux chevrons. [67]
Qu'on te dise cité gallèse Mais, capitale, tu résonnes Au nom breton de Roazhon.
Tes ardoises s’offrent à nos yeux Tantôt grises, tantôt bleues Du ciel changeant de nos saisons, Tantôt crachin, tantôt rayons.[68]
Saoule, la Vilaine sortit du lit, [69] Et dégorgea au fil des rues Tout le trop plein qu'elle avait bu.
Ce sont les vols réguliers [70] et des vols à la demande Sur Saint-Jacques-de-la-Lande.
On ôta le Gros de là-haut, [71] Fatigué d'avoir égrené Tant de décennies des Rennais.[72]
Ce fut enfin le train tout neuf, A grande vitesse te mettant plus près de Paris par le temps.[73]
Circule dans les rues de Rennes Et les Rennais de pédaler Sur des vélos au nom franglais.
On te disait cité austère Avec tes arcades de pierres Ville sévère, de grise mine, Aux gros pavés, à l’ardoise fine.[74]
Le maussade vieux torchis, Révélant tous ces pans de bois, De bien beaux ornements pour toi.
Des bâtisses ont empiété, Te transformant, autorisées, En esplanade minimisée.
Voire TNB par la suite, [75] Salle Omnisports en Liberté [76] Tes constructions ont muté.
De tes palais tu te rengorges. A ton couvent des Jacobins Tu prévois un nouveau destin.
Où il n'a rien d'un laquais, En bronze au brave Leperdit Sa stature épique tu rendis.
Sur tes places tu disposes Des oeuvres d'art insolites Tel de granit ce monolithe.
Cherche à se faire admirer. Une tête sur un plateau d'eau [79] Etonne vieux et ados.
Tout près du côté rebâti, Tu proposes à l'oeil d'accoler La chrysalide esseulée.
Voici les colonnes d'Aurélie Figées dans leur alignement, Menhirs en rangs assurément.[80]
Trouvant tes places minérales, De Bréquigny à Maurepas [81] Ils ont tant de parcs, n'est-ce-pas ?
De courir dans les rues de Rennes : Octobre, les Rennais se foulent Et à bonnes foulées déroulent.[82]
La nuit, tu te réjouis, Avec tes étudiants, danses Et chaque année tu entres en transes.[83]
Rue de la soif font grand tapage,[84] T'accolant une renommée Que Marbode eut bien aimée.[85]
Qu'aussitôt ils sont maculés De gribouillis laids et abscons, Tracés furtifs de jeunes cons.[86]
Chaque année, début juillet, De tes Rennais on voit briller, Les yeux que le sommeil fuit Lors des tombées de la nuit. [87]
Tes rotatives chaque nuit S'activent et, au petit matin, Sort le plus grand quotidien. [88]
Telle Atalante, déesse mythique, Des télécoms aux fibres optiques Tu cours, mais laisses les pommes d’or. Trois mille chercheurs ont fait ton fort. [89]
Les livres dont tu disposes, Du passé l'exposition, Sciences en compréhension.[90]
Tu achevas en l’an deux mille Pour ton transit automobile De boucler enfin ta ceinture Où tu laisses filer les voitures.
Milon, Fréville suivi d'Hervé[93] [94] Auquel succède Delaveau, Au fil des ans tes maires nouveaux.
Et de Bretagne la capitale. Puis métropole un beau matin, Tu t’offres un métropolitain.[95]
Le Val filera en navettes Prenant l’air ou souterrain Pour les citoyens de demain.
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