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Jean Leperdit
Jean Leperdit
(5 mai 1752, Noyal-Pontivy, Morbihan - 3 août 1823, Rennes)
Maître-tailleur de profession, il a été maire de Rennes. Il est surtout connu pour s'être opposé à Jean-Baptiste Carrier[1], qui l'avait nommé officier municipal. Le rôle exact qu'il joua apparaît moindre qu'il n'a été décrit, quelque peu enjolivé, conté pour la première fois par Emile Souvestre en juillet 1838, dans un article de la Revue des Deux-Mondes.
Des évasions ayant eu lieu, comme Carrier lui intimait l'ordre de "serrer les prisonniers de plus près, notamment les émigrés et les prêtres", Leperdit, officier municipal calme et courageux, rétorqua qu'il ne pouvait les traiter comme des condamnés; Carrier répondant qu'ils étaient hors la loi, Leperdit répondit : "ils ne sont pas hors l'humanité". Leperdit, membre du Conseil Général de la commune et mandaté par lui, refusa, le 22 septembre 1793 (an II), de livrer à Carrier, qui la réclamait, la liste d’habitants de Rennes compromis dans le fédéralisme, chez lesquels devaient s’opérer des visites domiciliaires, en vertu d’instructions du ministre Gohier qui avait prescrit, à la suite de la prise de Toulon par les Anglais, de rechercher les étrangers suspects sur tout le territoire de la République. Remettre cette liste à Carrier, c’était dénoncer les Rennais qui s’y trouvaient inscrits, provoquer leur arrestation, amener leur condamnation, les vouer presque sûrement à la mort.
Résister à Carrier à Rennes, c’était s’attirer sa colère, s’exposer à monter soi-même sur l’échafaud. Leperdit n’hésita pas et sauva ses concitoyens. Il ne dressa pas de liste et, en fait, n'eut pas à la déchirer comme le montre la statue. S'adressant aux religieuses enlevées de l’Hôtel-Dieu par Carrier, il interroge : "Que faites-vous ici ? Votre prison, c'est l'hôpital; les malades vous y attendent; c'est là que vous pouvez servir utilement la patrie", et il les y reconduit lui-même[2]. Il est certain que Carrier pense à lui lorsqu'il écrit, le 27 septembre, au comité de Salut public en suggérant de transférer les coupables de fédéralisme hors de Rennes car "quelques patriotes commencent déjà à sentir une fausse humanité pour eux"[3]. À son départ pour Nantes, le 6 ou 7 octobre 1793, Carrier indiquant à Leperdit qu'il reviendrait à Rennes, celui-ci répondit calmement: "Eh bien, tu me retrouveras !" Leperdit fut nommé maire, en remplacement d'Elias, le 21 février 1794 et le resta jusqu'en octobre 1795. Il succomba peu après avoir été grièvement blessé dans un incendie qu'il combattait.
Homme probe, Leperdit s'était vu confier par quelques nobles une somme importante de 2490 livres 15 sous, à charge pour lui de la distribuer aux pauvres à sa guise, sans avoir à en rendre compte. Ces dons furent portés sur les registres municipaux et les sommes distribuées, Leperdit se présenta en comptable à ses collègues, leur soumettant la liste des bénéficiaires. Le registre des délibérations comporte ces mots : "Les personnes bienfaisantes qui ont donné des aumônes à distribuer au citoyen-maire, savaient qu'il était incapable de les faire tourner à un autre usage"[4].
Arguant que Leperdit, sous le régime de la Terreur, "avait totalement négligé les intérêts de sa famille pour s'occuper de ceux de ses concitoyens, qu'il s'est opposé de tout son pouvoir aux actes du Comité et de la Commission révolutionnaire, et que les effets de son zèle n'ont pu être arrêtés par les dénonciations de ces autorités, ni par les menaces et les arrêtés des Représentants du peuple, que son courage et sa fermeté ont sauvé la vie de plusieurs citoyens", la municipalité de Guy Lorin sollicite l'attribution de la Légion d'honneur à Leperdit mais Bonaparte ne donne pas suite[5].
La statue en bronze d'origine qui le représentait déchirant une liste de suspects, œuvre d'Emmanuel Dolivet réalisée en 1892, a été fondue par les Allemands fin 1941 pendant l'Occupation. Seule la tête sera sauvée et remise sur son socle le 12 décembre 1994,Place du Champ Jacquet, grâce à une nouvelle fonte réalisée à partir d'un moulage retrouvé chez un antiquaire en 1985.
« La statue de Leperdit, ancien maire de Rennes, vient d'être coulée dans les ateliers de M. Guy, fondeur, en présence du sculpteur Dolivet et d'un contremaitre de la maison Thébaud, de Paris. L'opération a parfaitement réussi. Cette œuvre figurera au Salon prochain. »
— Journal de Rennes
Origine : Numéro du 14 mars 1892 • Recueilli par Manu35 • 2018 • licence
Leperdit est le seul maire de Rennes à avoir sa statue érigée dans les rues de la ville[6]. Une statue de Edgar Le Bastard fut aussi fondue sur ordre des Allemands pendant la seconde guerre mondiale et n'a pas été renouvelée. Au cimetière du Nord, dès le dôme d'entrée, on aperçoit au cœur de la plus ancienne section , une sépulture néoclassique:une colonne de granit rose d'environ 2 mètres soutenant un vase Médicis, édifiée pour Jean Leperdit.
Références
- ↑ Rennes d'histoire et de souvenirs quatrain 22
- ↑ Rennes et la Haute Bretagne, par Joseph Chardronnet. éditions France-Empire; 1980
- ↑ Histoire de Rennes sous la direction de Jean Meyer, Privat éditeur.1972
- ↑ Album breton. Souvenirs de Rennes, par Ducrest de Villeneuve
- ↑ Guy Lorin, Maire de Rennes de 1801 à 1808 et en 1815, par Philippe Bodin. Bulletin et mémoires de la SAHIV, Société archéologique et historique d'Ille-et-Vilaine t. CXIX/1 - 2015
- ↑ http://www.ouest-france.fr/lheroique-maire-de-rennes-rentre-la-maison-149993
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