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« Bombardement du 17 juin 1940 » : différence entre les versions

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Rennes - j'étais sur la passerelle de la gare. J'avais une paire de jumelles à 2 sous que mon père
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m'avait offerte et je disais à un ami « '''Si les boches reviennent''', je pourrais les voir arriver ». Tout à
m'avait offerte et je disais à un ami « '''Si les boches reviennent''', je pourrais les voir arriver ». Tout à
coup j'ai entendu une énorme explosion, et je vois 3 avions (des stuka) arriver en rase mottes et faire
coup j'ai entendu une énorme explosion, et je vois 3 avions arriver en rase mottes et faire
un bond pour passer la passerelle. Ils étaient trop bas pour être touchés". Il apparaît donc que quand le jeune Guy les aperçoit, les appareils ont déjà lâché leurs bombes sur la gare de triage de la plaine de Baud". M. Guy Faisant confirme qu'il n'y avait bien que 3 avions et n'a pas entendu ou vu un passage préalable d'avions d'ouest en est.<ref> rencontre du 4 mai 2012 avec E. Maignen</ref>
un bond pour passer la passerelle. Ils étaient trop bas pour être touchés". Il apparaît donc que quand le jeune Guy les aperçoit, les appareils ont déjà lâché leurs bombes sur la gare de triage de la plaine de Baud". M. Guy Faisant confirme qu'il n'y avait bien que 3 avions et n'a pas entendu ou vu un passage préalable d'avions d'ouest en est. Quant à l'identification des avions, il avait cité dans un témoignage <ref> ''Ouest-France'' , édition de Rennes, du 1er juin 2010</ref> qu'il s'agissait de stukas mais ne peut en être sûr en raison de la rapidité du passage bas des avions qui leur a fait baisser la tête.<ref> rencontre du 4 mai 2012 avec E. Maignen</ref>


Guy Faisant, 15 ans en juin 1940  
Guy Faisant, 15 ans en juin 1940  

Version du 10 mai 2012 à 12:13

16 juin, un étrange dimanche dans Rennes encombrée

Le dimanche 16 juin 1940, le journal publie un article rassurant sur l'efficacité de "nos bombardiers contre "leurs" chars : Ils se comptèrent avec des rires et partirent pour la troisième fois." En page 3, sous la rubrique Rennes, il indique que, vu l'afflux, quai Emile Zola,où une photo montre la foule des demandeurs de la carte d'identité nécesssaire pour circuler sur les routes et en chemin de fer, un second bureau est ouvert au 40 [[rue Vasselot]) à l'école de Préapprentissage. On lit aussi que, sur ordre de l'autorité militaire, les communications téléphoniques émanant des cafés, hôtels et restaurants sont supprimées et il est interdit de servir les clients aux terrasses. Il est aussi rappelé aux membres de la défense passive de Rennes qu'ils ne doivent sous aucun prétexte quitter la ville.[1]

Les Rennais et les nombreux réfugiés ont entendu des tirs de la D.C.A dans le ciel de Rennes tout bleu, probablement pensera-t-on ensuite, sur un avion allemand venu repérer le triage ferroviaire de la plaine de Baud avec les trains qui y stationnaient nombreux. En fin d'après-midi, encore quelques trains de troupes françaises et britanniques se succèdent après avoir stationné sur la voie ferrée, du côté du boulevard Voltaire, attendant d'entrer en gare.

Dans l'hebdomadaire Pierrot du 9 juin 1940

Un lundi matin de guerre

Une semaine avant, des petits Rennais, en regardant leur hebdomaire Pierrot, avaient pu voir, sur une des pages intitulées "Apprenez à reconnaître les avions ennemis", en n° 15, un dessin de l'illustrateur Marcel Jeanjean, présentant le Dornier Do-17 qu'il disait surclassé par les avions de chasse alliés.[2] Mais, ce matin du 17 juin, il n'y avait pas d'avions de chasse alliés dans le ciel rennais.

Le Rennais qui a acheté le journal ce lundi matin n'a en mains qu'une seule feuille, au lieu de quatre la veille. Il va encore faire beau, voire chaud. Décidemment même le journal... plus rien ne marche... La première page titre : Le maréchal Pétain, président du Conseil, le général Weygand, vice-président et un titre plus petit annonce la RAF au dessus de l'Allemagne, mais en lisant l'article il constate aussi qu'elle opère au sud de la Seine... Et un autre annonce : "Paris reste digne sous l'occupation allemande". Au verso, pas de nouvelles locales. Seulement deux communiqués de l'Université de Rennes :"en raison de la difficulté des communications" les examens du baccalauréat sont différés. Pour la Faculté de Droit, les examens, qui ne devaient concerner que les étudiants de Rennes et de Lille, sont ouverts à tous à la faculté des Lettres, place Hoche et au Palais de Justice.[3]

Soudain, le bombardement

René Patay, après avoir entendu une violente explosion, vers 10 heures, voit les gens se cacher sous les pommiers et, de la hauteur de la Massaye que les Anglais évacuent en hâte, il aperçoit, sous un ciel d’orage particulièrement noir, la ville de Rennes couverte d’une épaisse fumée. Le docteur se rend à Rennes où il entend des rafales de mitrailleuse à la Courrouze et des explosions du côté de la gare. La gare des voyageurs n’a rien mais une épaisse fumée s’élève de la gare de triage d’où viennent des voitures d’ambulance ensanglantées filant vers les hôpitaux et les cliniques. Il fait quelques pansements dans un hôtel de la place de la Gare à des personnes atteintes par des éclats de verre (des vitres, dont toutes celles exposées à l'est, ont été brisées dans toute la ville). L'église Sainte-Thérèse, située à plus d'un kilomètre et demi, subit d'importants dégâts à ses verrières et portes nord-est et aux panneaux de la coupole et du choeur. Presque tous les vitraux de la basilique Saint-Sauveur, en centre-ville, furent soufflés "de l'intérieur vers l'extérieur". Que s’était-il passé ?

Un Dornier Do 17Z du groupe de combat allemand III/KG en 1940
Parcours probable des avions allemands pour le bombardement du 17 juin 1940

sur Rennes, quelques "crayons volants"

S'agissait-il d'un bombardement sur "cible d'opportunité", sur une cible trouvée par hasard, ou de la poursuite de la recherche d'un train de munitions de 12 wagons de mélinite commencée la veille du côté de Sillé-le-Guillaume ? La présence d'un avion allemand au-dessus de Rennes le 16 incline à accréditer cette hypothèse.

Quelques avions de la Luftwaffe à croix noires, provenant de l'aérodrome de Cormeilles-en-Vexin, près de Pontoise, à 300 km, des bimoteurs Dornier DO 17Z de l'escadre de combat (Kampfgeschwader) III/KG 76,[4] (commandant : major Franz Reuss), venant de l’ouest à très basse altitude, ont survolé la Vilaine, en mitraillant, en direction de la gare de triage [5] sans aucun risque, la D.C.A anglaise s’étant repliée dans la nuit... Avec un léger virage sur l'aile droite [6]du côté de la gare de voyageurs ils quittent la ville par le sud-est et après un virage à 180° à l'est, les "crayons volants", comme les appelaient les Allemands en raison du long et mince fuselage de ces avions, se présentèrent au-dessus de Cesson et dans l'axe du triage ferroviaire de la plaine de Baud où stationnent parallèlement une douzaine de trains, sur laquelle ils lâchèrent des dizaines de bombes SC50 de 55kg, ainsi que sur les voies ferrées de Saint-Hélier. ( voir le schéma du parcours probable ). Un chapelet de bombes tomba sur un train de munitions, causant une énorme explosion avec une grande colonne de feu et de fumée. (NB : Heinrich Weiss cite "quelque 120 bombes" larguées, ce qui supposent une participation de six Dornier, or la plupart des témoins citent trois avions, quelques uns cinq). Plusieurs ont cru voir des Heinkel, et surtout des Stukas, appareils qui avaient fortement impressionné les gens sur les routes de l'exode.) Une excavation de 80 mètres de longueur et 20 de largeur par 5 de profondeur marquait l'endroit. Des débris de wagons et des bogies avaient été catapultés à 300 mètres. [7]

une catastrophe humaine disproportionnée

Avaient été atteints d’abord un train de réfugiés de Lisieux, au niveau de Cesson-Sévigné à hauteur de Pincepoche et de Bray, faisant 21 victimes, ensuite la gare de triage de la plaine de Baud où 146 soldats français (203ème et 212ème d’artillerie venant des Flandres), amenés pour défendre le « réduit breton » mort-né, furent tués ainsi que 156 Anglais du Royal Engineer, dans un train qui aurait dû partir vers Brest à 9h00, enfin la gare de triage de Saint-Hélier où 206 artilleurs du 222ème et du 64ème RALD, la plupart originaires du Midi, trouvent la mort. Avant midi des pompiers, des cheminots et de courageux citoyens se rendirent sur place pour retirer des blessés tandis que des rescapés quittaient ce lieu d’horreur par le moulin de Jouet. À 12H30 la TSF diffusa le discours du maréchal Pétain : « C’est le cœur serré que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat… » Malgré l’interdiction du général Bazoches, qui avait constaté la catastrophe du haut du pont Saint-Hélier, et les explosions qui se succèdent pendant 24 heures, les sauveteurs continuèrent à sortir des corps mutilés, brûlés, racornis, et d’autres intacts, comme pétrifiés. Alors que continuaient des explosions, beaucoup de blessés furent arrachés des flammes par des pompiers héroïques, dont le lieutenant Lebastard, allongés sur le ballast et dans la prairie de la ferme du général Lefort. Bien que très endommagée elle-même, la clinique St-Yves fut elle-même fort endommagée, tout son personnel, ses religieuses et ses médecins se dépensèrent sans compter pour secourir de leur mieux le flot de blessés qui ne cessait de lui parvenir de la gare, d'autres étant dirigés vers les autres cliniques et l'hôpital de Pontchaillou.

Le nombre des victimes, hors de proportion avec l’importance des bombes larguées, vient d’une négligence des services de la gare de Rennes ou d'un ordre des autorités militaires qui, plaine Saint-Hélier, ont laissé le train d’artilleurs contre un train de munitions avec des wagons de cheddite qui, en sautant, ont broyé et enflammé le train voisin, et à Baud, ont mis un train de munitions entre le train des Anglais et celui des artilleurs français. À ces victimes, il faut ajouter quelques civils et militaires tués par éclats ou matériaux projetés. Traumatisée aux deux sens du terme, la ville se vide d'une partie de sa population qui, en voiture, à bicyclette ou à pied prend les routes de l'ouest ou du sud.[8] Les évacués ont abandonné des bagages et des voitures d'enfant qui seront stockés plus tard à la gare et classés par ordre alphabétique pour une recherche rapide.[9] Quant aux troupes, elles perdent ce qui pouvait leur rester de moral et elles vont se débander.

Le traitement médiatique : minimal localement, maximalisé à l'extérieur

Le communiqué officiel n°576 du 17 juin au soir ne mentionne pas ce bombardement sur Rennes.

L'information locale et régionale

A l'époque, l'information sera vague et minimaliste, par censure stratégique le lendemain du drame, par censure politique pendant l'occupation allemande : le quotidien Ouest-Éclair du 18 juin, dernier numéro avant une reprise le 5 juillet, ne comporte qu'une feuille : en première page,un entrefilet intitulé :

Bombardement aérien dans l'ouest

Quelque part dans l'ouest - Hier matin lundi, des bombardiers allemands ont survolé une des grandes villes de la région de l'ouest. On compte des victimes parmi la population civile, quelques morts et de nombreux blessés.

En page 2, comme si rien n'était survenu, sous la rubrique Rennes, l'état civil n'indique que 8 décès, dont 3 soldats aux armées. On trouve aussi un billet "en passant... le ravitaillement", faisant allusion à "ce qui s'est passé hier à Rennes" mais il s'agit de mesures de réouverture d'office de commerces alimentaires,restaurants, garages et stations services fermés par le propriétaire, et un article intitulé "Un homme se pend" concernant un Rennais de 87 ans, habitant avenue du cimetière de l'est.

Mais ce bombardement de Rennes prît une proportion d’autant plus exagérée que l’éloignement était plus grand. À Toulouse on lit dans «  La Dépêche » qu’il y a eu 4500 morts et que l’hôtel de ville de Rennes est détruit. A Beyrouth, où le professeur Burloud est en tournée de conférences, on annonça 20 000 morts !

Dans l'Ouest-Éclair du 5 juillet, premier numéro à reparaître mais sous censure allemande, on voit, en page 2, sous la rubrique Rennes, "Images de la ville", le marché aux fleurs de la place de la République, une soeur conduisant une carriole "en tournée pour les pauvres", et la toilette classique des rues par des employés avec pelle et arrosoir; en fait divers est relaté un incendie à Noyal-sur-Seiche à la ferme de la Boisardière. Il faut aller en page 3 pour trouver trace de la catastrophe survenue 17 jours plus tôt : la mairie donne la liste des 29 architectes affectés aux constats d'évaluation des dommages aux immeubles d'une trentaine de rues du canton sud-est sinistrées lors de "l'explosion du 17 juin", terme repris un an plus tard dans la presse contôlée par l'occupant. ( * )Et le journal du 10 juillet publie la liste des noms de 32 hommet et 2 femmes évadés de l'asile de Saint-Méen à l'occasion du bombardement du 17 juin.

Des communiqués allemands laconiques

Un document des Bundesarchiv indique : " De jour, mention de combat car hier, malgré une situation météorologique pénalisante, un bombardement du III/KG 76 sur la gare de Rennes dans la matinée a eu un effet foudroyant."

Le 18 juin, le communiqué du haut commandement de la Wehrmacht ( "Das Oberkommando der Wehrmacht gibt bekannt..." et celui de la Luftwaffe signalent qu' "un bombardement aérien a été couronné de succès sur des trains de transports, de munitions et de matériels industriels en gare de Rennes embouteillée. Des trains sautèrent en l'air dans de violentes explosions, déclenchant une panique monstre parmi les troupes".


Une pénible mission de réinhumation

En septembre, le docteur Patay recevra une mission d’officier d’état civil militaire bénévole avec des crédits pour l’exhumation, l’identification, la mise en bière et la ré-inhumation au cimetière de l’est des corps provisoirement mis en fosses communes le long des voies ferrées : prairie de Saint-Hélier, plaine de Baud et passage à niveau de Bray, en Cesson... " Dès le début de septembre nous attaquons le plus urgent, à savoir les fosses communes de la prairie Saint-Hélier. C'est un travail épouvantable car les corps, très déchiquetés par l'explosion des wagons de cheddite, ont été ensevelis pêle-mêle par un temps très orageux<; <ils sont en pleine décomposition et il faut avoir le coeur bien accroché pour les fouiller et les examiner en vue de leur identification. [...] Notre travail est compliqué par le fait qu'en raison de la chaleur étouffante qui régnait ce matin du 17 juin,la plupart des hommes avaient tiré la veste et n'avaient donc plus de papiers sur eux." 805 corps sont mis en bière, sans qu’on puisse compter les corps broyés, calcinés et démembrés, et des blessés graves retirés qui mourront ultérieurement. On peut estimer le nombre des morts à un millier, chiffre épouvantable, mais la moitié du chiffre 2000, lequel est encore couramment repris et cité.


--Stephanus 20 février 2012 à 09:24 (CET)


témoignages

"Le dimanche 16 juin, il faisait beau. A la fin de la journée, après dîner, je suis sortie prendre l'air avec des amies, mes voisines. Habitant rue Champion de Cicé, en bout de la ville, nous nous sommes dirigées vers le boulevard Voltaire et avons eu les yeux attirés par un train de voyageurs qui stationnait sur la voie ferrée en remblai. Les portières des wagons étaient ouvertes et on entendait des gens rire et s'interpeller. Nous approchant, on s'est vite rendu compte qu'il s'agissait de soldats en uniformes français. Nous sommes montées sur le remblai et le groupe de jeunes du quartier qui s'était formé a discuté un bon moment avec eux. Les soldats semblaient décontractés.

Le lendemain dans la matinée, il y eut ces détonations renouvelées sur la ville. On a su ensuite que des bombes étaient tombés sur la plaine de Baud et que plusieurs trains de soldats français et anglais avaient été démolis. La plupart des jeunes qu'on avait approchés la veille au soir n'étaient plus de ce monde."

Odette Dartois Cohignac, à Rennes - recueilli par --Stephanus 4 août 2011 à 13:32 (CEST)



"Le 16 juin, boulevard Voltaire, sur le pont de chemin de fer un long train bourré de soldats britanniques stationnait sur la voie Saint-Malo-Rennes. Ils avaient interdiction de sortir des wagons surchauffés. La chaleur à l'extérieur était intense et ils criaient leur soif.

A quelques mètres en contrebas du ballast existait un café, le Champ Fleuri. On peut dire que ce café a vidé sa cave ! mais aussi tous les voisins du quartier s'y sont mis. Bouteilles de cidre, vin, brocs d'eau pour soulager les soldats. Et dire qu'ils ont vu leur mort quelques heures plus tard.

Vers 19 heures le train a enfin réussi à entrer en gare de Rennes, via la plaine de Baud. Cela nous a tellement marqués que les souvenirs restent vivaces. A l'époque on parlait de 3000 à 5000 morts..."

Renée Closier, à Pacé. [10]


Note : les passages des témoignages mis en caractères gras par le rédacteur sont à l'appui de la thèse du parcours supposé des avions allemands sur la région rennaise ce 17 juin 1940.



"Mon père était directeur d'une société industrielle de produits chimiques, Bozel-Malétra, rue de la Carrière, le long de la Vilaine, près de la rue de Lorient où nous habitions. Ce jour-là, j'étais avec mon père. Il y avait, à proximité de l'usine, un très haut bâtiment. On dominait tout Rennes. Quand les premiers coups de sirène ont retenti, lors de la visite des Allemands et du bombardement, on est montés tout en haut.

Ce n'était pas une alerte d'entraînement. On a vu, tout de suite, aussi, que ce n'était pas une simple visite. On a juste eu le temps de voir trois bombardiers qui nous ont presque rasés. On s'est mis accroupis. Nous les avons regardés. Ils ont suivi la Vilaine et ont pris la direction de la gare et de la plaine de Baud. Quelques minutes après, on a commencé à entendre les explosions. C'est épouvantable le bruit que cela faisait. Il y avait des éclats de lumière et de la fumée. Bien que loin et avec mon père, j'ai eu peur..."

Joseph-Jean Naviner, 13 ans en juin 1940[11]


"Le 17 juin 1940, ce fut le bombardement de la plaine du Baud. Ce matin-là, je devais me rendre, en compagnie de ma mère, chez un médecin, en centre-ville, rue de Montfort. Parvenus à 50 mètres du pont, nous vîmes surgir tout à coup, et passer très rapidement au-dessus de l’ouvrage, direction Ouest, deux avions allemands frappés d’une croix noire. Allâmes nous jusqu’au bout, malgré les bruits d’explosions entendus, cela n’est pas certain."

Marc Pépin, 7 ans en juin 1940 [12]



" Sur le chemin de l'école - j'étais collégien à l'école technique d'industrie de Rennes - j'étais sur la passerelle de la gare. J'avais une paire de jumelles à 2 sous que mon père m'avait offerte et je disais à un ami « Si les boches reviennent, je pourrais les voir arriver ». Tout à coup j'ai entendu une énorme explosion, et je vois 3 avions arriver en rase mottes et faire un bond pour passer la passerelle. Ils étaient trop bas pour être touchés". Il apparaît donc que quand le jeune Guy les aperçoit, les appareils ont déjà lâché leurs bombes sur la gare de triage de la plaine de Baud". M. Guy Faisant confirme qu'il n'y avait bien que 3 avions et n'a pas entendu ou vu un passage préalable d'avions d'ouest en est. Quant à l'identification des avions, il avait cité dans un témoignage [13] qu'il s'agissait de stukas mais ne peut en être sûr en raison de la rapidité du passage bas des avions qui leur a fait baisser la tête.[14]

Guy Faisant, 15 ans en juin 1940



" Nous habitions rue Octave Mirbeau, près de la rue de Riaval, alors en limite sud-est de la ville. Le 17 juin 1940, quelques minutes avant le bombardement, j'étais dans notre jardin regardant mon père ratisser pour enfouir des graines qu'il venait de semer. C'est alors que des avions survolèrent à moyenne altitude notre jardin, en courbe vers le sud-est. Je fis remarquer à mon père les carlingues qui brillaient au dessus de nos têtes, et il fit le simulacre de les abattre avec son manche de râteau, à ma grande satisfaction. Il ne les avait pas identifiés mais, quelques minutes après, cela était fait : une formidable explosion et un nuage obscurcissant le ciel s'en chargeaient. Après nous avoir survolés ils avaient dû faire un large virage dans une trajectoire qui dut leur permettre de se retrouver en enfilade des voies ferrées du triage car, après l'explosion, ils passèrent au nord de chez nous, quelque part au-dessus du pont Saint Hélier et de la rue Pierre Martin.

Les carreaux de fenêtres de la maison côté est volèrent en éclats, à l'exception de ceux d'une fenêtre ouverte sur une pièce où la cloison fut soufflée. Un morceau de wagon brûlait sur le toit et un nuage nauséabond dispersait dans le jardin un épais manteau de suie accompagné d'objets calcinés : chaussures, masques à gaz et autres, dont un carton d'un magasin de vêtements de Roubaix. Le soir, notre maison accueillit des réfugiés dont une dame et ses deux petites filles du Nord. L'enchaînement des faits laisse l'évènement très présent à ma mémoire."

Gilbert Guillou, 6 ans en juin 1940 Rennes.



En juin 1940, mes parents habitaient le 121 de la rue de Châteaugiron devenu le 113 aujourd'hui. Cette maison est à droite de l'entrée du groupe scolaire du Landry. Nous avions un jardin en face du numéro 140 de cette même rue. Ce 17 juin, mon père était sur une échelle à cueillir des cerises. Et, moi, j'étais au pied de l'arbre pour ramasser celles qui tombaient. Soudain, nous avons entendu un mitraillage à droite, vers Cesson. Et, au même moment, nous avons vu trois avions allemands. C'étaient des bimoteurs Dornier, pas des stukas.

Une explosion énorme, suivie de nombreuses autres, pendant près de deux jours, avec projections de nombreux éclats, a semé la peur! Une maison de la rue de Vern a été incendiée par un morceau de wagon venu de plusieurs centaines de mètres.

Avec papa, nous sommes rentrés à la maison et, avec des voisins, nous nous sommes cachés dans un chemin creux en face de la maison.

Émile Riaudel, 13 ans en juin 1940 [15]



" Je suis entré dans la guerre, pour de bon, le lundi 17 juin 1940, vers 10 heures 30 du matin, place de Bretagne. Le hurlement des sirènes, les sifflements aigus et stridents de stukas qui plongeaient sur leur cible, le bruit des explosions agitant les vitres de la porte d’entrée de l’immeuble où je m’étais réfugié, m’effrayaient. J’ai vu les avions passer au ras des toits. J’ai vu les boules de feu clignotantes au devant de leurs ailes, signe évident que les pilotes ne se contentaient pas de lâcher leurs bombes et qu’ils mitraillaient la ville aveuglément, cherchant ainsi à semer la panique, ce qui réussit parfaitement (...] Une fois le calme revenu, j’ai repris mon vélo, abandonné au milieu de la rue dans ma course pour chercher un abri.[...] À la maison, j’ai trouvé ma mère complètement affolée, heureuse quand même de nous voir sains et saufs, Geneviève et moi.

- Où sont tes frères ? - Je ne sais pas, ils ne vont sûrement pas tarder à arriver. Il me semble que le bombardement a eu lieu du côté de la gare. Ce n’est pas sur leur trajet de retour. Ne t’inquiète pas ! J’ai bien évité de lui parler du mitraillage de la ville."

André Triverio, [16]



"Nous voyons à l'horizon, derrière le centre-ville, une masse d'air qui précède une terrible détonation. La terre tremble, les flammes montent à lécher les nuages. A l'étonnement et à la peur succède la panique.

Des militaires qui campent à l'école des Trois-Croix," (NB : à 3 km des voies de triage ) "en face de notre maison, sont liquéfiés. Devant nous, des gradés arrachent leurs galons ou cherchent des vêtements civils. Certains demandent à notre père de cacher leurs revolvers. Si les plus débrouillards s'évanouissent dans la nature, le gros du régiment attend, résigné, l'arrivée de l'ennemi. Les civils quittent la ville..."

Julien Thomas, 14 ans en juin 1940"[17]



"Le train devait partir le 16 juin. Il est resté sur place, côte à côte avec des trains de réfugiés, de militaires français, anglais et sanitaires, et de munitions. Le matin du 17 juin, mes soeurs nous firent demander quelques objets précieux oubliés dans la précipitation. Nous partîmes donc en auto à la gare. Sur le conseil d'un cheminot, nous arrêtames notre auto à 5 ou 6 mètres d'un train bien banal et nous nous apprêtâmes à rejoindre à pied le train des banques. A ce moment nous avons très bien entendu les avions arriver. Il y en avait cinq. Ils savaient très bien ce qu'ils faisaient, quel était le train de munitions, volaient au plus bas et ce n'est pas une bombe qui a touché de plein fouet sa cible mais plusieurs..."

Mme Char... [18]



"A Rennes, ils étaient à la gare quand ils furent bombardés et ils sautèrent par dessus des murs pour s'abriter. Mon père me raconta que le train à côté était plein de gars du régiment de Manchester qui fut touché. Il se souvenait qu'un homme fut accusé de collaboration, d'avoir, à la gare, pointer son doigt pour alerter les Allemands. Cet homme fut exécuté sur le champ ( je n'ai jamais pu relire cela ailleurs). Mon père partit pour Saint-Malo..."

Phil Smith, fils du sergent Les Smith. [19]

(NB : ce témoignage de seconde main, apparemment surprenant, l'est moins si l'on se remémore la hantise, courante à l'époque, d'agissements sournois attribués à la "cinquième colonne". )



références

  1. L'Ouest-Eclair, 16 juin 1940
  2. Pierrot, "le journal des jeunes", p. 7 - 9 juin 1940
  3. L'Ouest-Eclair des, 16 et 17 juin 1940
  4. traduction du Manuscrit de Heinrich Weiss, dans Eagles over Europe IHRA 2010, air corps 1 , dans LEMB Stammkennzeichen data base project. Larry Hickey
  5. témoignage de Joseph-Jean Naviner. Ouest-France, édition Rennes 3 juin 2010
  6. Lancastria Association of Scotland/Hirst 2001-2008
  7. témoignanges dans Ouest-France du 17 juin 1960
  8. Les Heures douloureuses de Rennes, par V. Ladan. Impr. Les Nouvelles
  9. 2 photos de L'Ouest-Eclair du 8 juillet 1940
  10. Ouest-France, édition de Rennes, 1er juin 2010
  11. Ouest-France, édition de Rennes, 3 juin 2010
  12. "Ouest-France", édition de Rennes, 1er juin 2010
  13. Ouest-France , édition de Rennes, du 1er juin 2010
  14. rencontre du 4 mai 2012 avec E. Maignen
  15. Ouest-France, édition de Rennes, 1er juin 2010
  16. Comme l'oiseau fait son nid ch. 14, par André Triverio
  17. L'Ille-et-Vilaine en guerre. Ed. Ouest-France - 2004
  18. Rennes, 17 juin 1940, tragédie dans la gare à la plaine de Baud par Yves Beaujuge -20 septembre 2006
  19. fév. 2011 World war 2 talk.

liens directs

Vidéo

Le 3 juillet 1940, les actualités cinématographiques allemandes (Deutsche Wochenschau) présentent les conséquences du bombardement sans toutefois faire allusion au nombre de victimes. À partir d'une minute, on peut voir des images de la gare de triage de la Plaine de Baud, et des équipes de déblaiement en action.

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