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Rue Sergent Guihard
La rue Sergent Guihard, axée nord-sud, relie la rue Martenot à la rue Kléber.
La voie à son origine, passage de Bel-Air
De son ouverture vers 1895 jusqu'en 1933, elle porta l'appellation non-officielle de rue de Bel-Air. En effet, elle apparaît toujours dans la nomenclature des voies de Rennes du 24 juillet 1923 comme "passage de Bel-Air", son ancien nom provenant de celui d'un manoir du XVIIème siècle.
Du passage Belair au passage Sergent Guihard
L'accident du 27 mars 1933
Le sergent Joseph Guihard, sergent sapeur-pompier et sergent-major des Hospitaliers Sauveteurs Bretons, perdit la vie en tentant de porter secours à deux employés de la compagnie du Bourbonnais, André Chesnot et Pierre Caro, asphyxiés par des émanations de gaz surpressé dans une fosse comportant un détendeur, rue de Bel-Air, le 27 mars 1933, vers 15h30. Une explosion et un incendie tuèrent les deux employés et celui qui était descendu pour les sauver.
« Vers 15 h. 30, les habitants du passage Bel-Air sont mis en émoi par des appels au secours. De tous les immeubles, les habitants du quartier accouraient vers l'extrémité du passage Bel-Air qui ouvre sur la rue Martenot. Là, une passante affolée montrait du doigt deux bouches qui s'ouvraient, béantes, au milieu de la chaussée, et par ces orifices, on voyait au fond d'une fosse bétonnée, profonde d'un mètre quatre-vingt environ, deux corps étendus l'un sur l'autre. Une forte odeur de gaz s'échappait de cette fosse. Les sauveteurs improvisés qui s'empressaient comprirent le danger. Les deux hommes dont les corps reposaient, inanimés sur le sol de la fosse, étaient des employés de la Compagnie du Gaz qui, surpris sans doute dans leur travail par la rupture d'une conduite, avaient été asphyxiés subitement. Sans souci des risques que comportait l'aventure, ils furent plumeurs qui se penchèrent sur la fosse, cependant qu'en toute hâte, d'autres se précipitaient vers la caserne Saint-Georges pour alerter les pompiers.
Quelques minutes plus tard, le sergent-major Guihard et le pompier-mécanicien Pierre Galle arrivaient sur les lieux. Prenant à peine le temps d'ajuster son masque, le sergent Guihard descendait dans la fosse. Quelques secondes et un premier corps était remonté à la surface quelques secondes encore, et ce fut le deuxième acte de cette tragédie. Le sergent Guihard qui, déjà, avait passé une corde sous le corps du second ouvrier, s'abattait soudain sur celui qu'il voulait sauver, atteint lui-même, malgré son masque, par les émanations de gaz. Les sauveteurs demeurés sur la chaussée se penchèrent encore sur ces deux hommes que menaçait la mort. L'un d'eux réussit à entourer une jambe de l'ouvrier qui fut ainsi hissé sur la chaussée. Restait le corps du sergent-major. On essayait déjà de le ceinturer à son tour lorsqu'une explosion retentit. En même temps, une gerbe de flammes s'échappait de la fosse, brûlant assez sérieusement quelques-uns des braves gens qui s'empressaient au secours des accidentés. Dès lors, il fallait accepter l'inévitable. On essaya pourtant de lutter encore. Des services de la voirie, on fit venir un tombereau de sable qui fut déversé dans la fosse. Le feu continua de brûler. Le malheureux sergent, asphyxié par le gaz, écrasé par le sable, brûlé par les flammes, ne pouvait plus échapper à la mort. On conservait l'espoir de sauver les deux ouvriers pour le salut desquels le sergent s'était sacrifié. Leurs corps avaient été transportés à l'Hôtel-Dieu et médecins et internes pratiquaient sur eux les tractions préconisées en pareil cas. Trois heures d'efforts généreux et de soins dévoués sont demeurés inutiles. Quelques minutes avant que ne fut dégagé le corps du sergent-major Guihard, nous apprenions que les deux ouvriers de la Compagnie avaient, eux aussi, succombé.
La catastrophe du passage Bel-Air avait fait trois victimes. »
— L'Ouest-Eclair du 28 mars 1933
Origine : Résumé de l'accident • Recueilli par Manu35 • 2017 • licence
L'hommage au cimetière de l'Est
Des obsèques solennelles furent organisées par la ville de Rennes avec chapelle ardente à l'hôtel de ville et cérémonie à l'église Notre-Dame-en- Saint-Melaine[1]. Plus de 10 000 personnes sont venues rendre un dernier hommage aux trois victimes[2].
Le sergent Guihard est inhumé au cimetière de l'Est. La ville de Rennes a tenu à accorder au malheureux une tombe à perpétuité ainsi qu'un monument dédié à sa mémoire:
« Ainsi que nous l'avons annoncé, le Conseil municipal a pris l'initiative d'offrir à la famille du sergent Joseph Guihard, ce courageux sous-officiers de la Compagnie des Sapeurs-Pompiers de Rennes, qui trouva une mort héroïque dans la catastrophe du Passage Belair, un monument qui sera élevé sur la tombe du regretté défunt. Ce monument [...] sera posé sur la tombe pour les fêtes de la Toussaint. »
— L'Ouest-Eclair du 4 octobre 1933
Origine : L'hommage suprême de la ville de Rennes au sergent Joseph Guihard, victime du devoir • Recueilli par Manu35 • 2017 • licence
L'annonce officielle du changement de dénomination
Le maire de Rennes Jean Lemaistre va annoncer, lors d'un discours tenu le jour des obsèques des trois victimes et qui va d'abord rendre compte de la carrière du sergent, le probable changement:
« Le sacrifice du sergent Guihard avait été inutile une victime s'ajoutait aux deux autres une autre vie humaine était perdue, augmentant notre deuil, apportant la douleur dans une autre famille, jetant enfin la consternation dans le cœur de ses amis et de ses camarades de la Compagnie de Sapeurs-Pompiers. Mais si ce sacrifice de Guihard a été inutile, je ne peux cependant pas dire qu'il ait été vain ce sacrifice du sergent Guihard a pour nous tous, et particulièrement pour la Compagnie de sapeurs-pompiers de Rennes, la signification et la force d'un exemple. Les vertus d'honneur et de dévouement qui sont la tradition de notre Compagnie, s'en trouveront accrues.
Le Conseil Municipal - appuyé en cela par M. le Préfet d'Ille-et-Vilaine, que je remercie - a demandé que la Légion d'Honneur soit accordée à Guihard à titre posthume. Nous espérons que cette distinction lui sera conférée.
Je proposerai aussi à mes collègues, dans leur prochaine réunion publique, que le passage Bel-Air soit désormais appelé "Passage Sergent Guihard" afin que demeure plus longtemps le souvenir d'un homme, qui, victime du devoir, a droit à la reconnaissance de la cité rennaise. »
— L'Ouest-Eclair du 4 octobre 1933
Origine : L'hommage suprême de la ville de Rennes au sergent Joseph Guihard, victime du devoir • Recueilli par Manu35 • 2017 • licence
Finalement, l'hommage de la ville est rendu à l'infortuné quelques semaines après l'accident. Le passage de Bel-Air fut débaptisé pour recevoir, par délibération de conseil municipal de la ville de Rennes du 16 juin 1933, le nom du sergent Joseph Guihard :
« Le Conseil Municipal se réunira en séance publique, à l'Hôtel de Ville, ce soir, 16 juin 1933, à 20 h. 30. Voici l'ordre du jour : [...] Hommage au sergent Guihard : dénomination du "Passage Sergent Guihard" au passage Belair. »
— L'Ouest-Eclair du 16 juin 1933
Origine : Le Conseil municipal se réunit ce soir • Recueilli par Manu35 • 2017 • licence
La pose des plaques
Dans son numéro du 5 octobre, L'Ouest-Eclair annonce avoir posé les plaques de rue le mardi 3 aux deux entrées de la voie:
« Afin de perpétuer le souvenir du sergent Guihard qui trouva une mort héroïque dans la catastrophe du passage Belair, en mars dernier le Conseil municipal avait décidé de donner le nom du sergent Guihard à cette artère. Depuis avant-hier, les plaques portant le nom du héros de cette catastrophe ont été apposées aux deux extrémités de ce passage. »
— L'Ouest-Eclair du 5 octobre 1933
Origine : Le passage sergent Guihard • Recueilli par Manu35 • 2017 • licence
Du passage à la rue
Ce n'est que la délibération de conseil municipal de la ville de Rennes du 5 novembre 1979 qui modifiera le nom de "passage" et viendra donner un caractère officiel à l'appellation rue Sergent Guihard.
On y trouve
Mathurin Le Michel né en 1830 à Saint-Vran (Côtes d'Armor), d'abord cultivateur comme son père puis cantonnier à Illifaut (Côtes d'Armor) s'installa photographe en 1864, sous l'enseigne "Photographie moderne", au 6 bis rue du Bel Air, dans l'atelier qu'occupait précédemment François Marie parti à Laval. Le Michel, qui signait ses photos "A. Le Michel", ne quittera pas la rue du Bel Air où il était toujours recensé en 1906[3]. Au n° 9 de la rue vécut de 1867 au 29 mai 1869, date de son décès sur place, un demi-frère de Napoléon III, Louis comte de Castelvecchio. Au n° 18 de la rue, on trouve une église du rite orthodoxe.
Références
- ↑ Ouest-Eclair du 28 mars 1933
- ↑ Ouest-Eclair du 31 mars 1933
- ↑ Basilique Saint-Aubin galerie cartes postales
Sur la carte
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