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Les Rennais maréchalistes

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21 janvier 1941 : jusqu'où va le pétainisme...

La population rennaise est, dans son ensemble dans les deux premières années de l'occupation, maréchaliste, ce qui ne signifie pas collaborationnistes et a fortiori pro-nazi. Des collaborationnistes, certes il y en eut, tel le docteur Ambroise Tizon, domicilié place de Bretagne, radiologue au Centre anti-cancéreux et à la clinique Saint-Vincent, dont il est l'un des copropriétaire; Tizon ne cachait ses sympathies allemandes en adhérant au Mouvement social révolutionnaire Wikipedia-logo-v2.svg (MSR), plus collaborationniste que vychiste, d’Eugène Deloncle au début de 1941, jusqu’à sa dissolution en avril 1942. Puis, en juillet 1942, avec les docteurs Perquis, Doisy, Massot et l’avocat Perdriel-Vaissière, ils installèrent le Comité des amis de la LVF. Le nom Tizon figure sur une liste d’indicateurs du Sicherheistdienst (SD), retrouvée à la Libération avenue Jules Ferry, avec le N° SR 743. [1] Le journal indique que le théâtre était comble, le dimanche 16 novembre 1941, pour entendre Alphonse de Chateaubriant,né à Rennes, chantre de la collaboration, venu souligner la nécessité du rapprochement franco-allemand.

Mais les Rennais se manifestèrent en sens inverse et sans équivoque de temps à autre, comme Le 11 mai [2] et le 17 juin 1941.[3] Mais si les gouvernements de Vichy sont souvent critiqués, surtout en raison des pénuries et du rationnement, la confiance subsiste envers le vieux maréchal. Un exemple illustre cette attitude.

Carte postale avec au verso la mention :" Vendue 1 franc au profit du"Secours National" et du "Comité Central d'Assistance aux Prisonniers"
Ouest-Eclair, 17 novembre 1941

Le 26 décembre 1941, dix écoliers d’Ille-et-Vilaine, à l’instar d'élèves des autres départements, partent pour Vichy, et ces « ambassadeurs de la Jeunesse » d’Ille-et-Vilaine sont salués à leur départ en gare de Rennes par les plus hautes personnalités du département, préfet en tête. Le 31 décembre l’Ouest-Eclair, qui avait copieusement relaté le départ, rapporte les impressions des jeunes à leur retour : certains sont enroués d’avoir trop chanté « Maréchal, nous voilà ! », le maréchal leur paraît bien moins vieux que son image. Une petite fille relate : «  le Maréchal est venu nous parler, il nous a montré le soleil qui brillait et il a dit : « Dites à vos parents que c’est le soleil du Maréchal » et en nous quittant il a déclaré : « Je suis obligé de m’en aller, comme vous partirez vous-mêmes bientôt, parce que, comme vous aussi, j’ai un programme à remplir, celui de sauver la France. »

Une belle ode à la France se termine en 1941 par l'image du maréchal, une louange et un souhait

Ce comportement des enfants dûment conditionnés est le fait des parents et de l’encadrement. Les propos des enfants, béats, pour ne pas dire benêts, sont à n’en pas douter ceux de l’opinion majoritaire. Ce n’est qu’au fil du temps, et surtout après l’invasion de la zone « nono » (non occupée), par les Allemands fin novembre 1942, que l’impression d’un maréchal qui n’a pas de liberté s’accroît et le S.T.O. organisé par Laval va largement entamer sa popularité sans toutefois la faire disparaître totalement. Le Dr Marquis, comme beaucoup d'anciens de la Grande guerre était un maréchaliste convaincu, puis, selon un rapport du 14 septembre 1944, rédigé par le Commissaire Divisionnaire des RG : « Ce sentiment d’admiration pour le chef de l’État et de son gouvernement s’atténua progressivement, au cours de l’année 1943, notamment lorsque le Maréchal fit appel à Darnand, et Déat, il se montra adversaire des méthodes de la Milice et, en juin 1944, il soignera de nombreux soldats anglais et américains, amenés par les Allemands à l’EPS de la rue Jean Macé. [4] [5]

En tout cas, dans les bouches rennaises, la place du maréchal Pétain resta bien, pendant toute la guerre, la place de la Mairie (*) [6] et le 21 août 1944 c'est... place du Maréchal Pétain que le général de Gaulle sera acclamé par les Rennais. La place ne retrouvera sa dénomination antérieure que le mois suivant par délibération du conseil de la délégation spéciale.[7]

(Le nom du maréchal Pétain sera, après la guerre, effacé de la frise supérieure ornant les parois du Panthéon rennais).

Témoignage

Enfant, - j'avais 5 ans en 1941 - je n'ai jamais entendu autour de moi, pendant la guerre, des Rennais employer la dénomination "place du maréchal Pétain" pour désigner la place de la Mairie, où nous prenions parfois le tramway ou l'escalier sous le côté sud des arcades donnant rue de Coëtquen. Je pense que, par habitude, plus que par opposition au régime, les Rennais utilisaient l'ancienne dénomination, plus significative du lieu, et mon grand-père parlait encore en 1944 de la rue de Bourbon, non significative d'un lieu mais ancienne dénomination de la rue Edith Cavell, périmée depuis 29 ans.[8]

Étienne Maignen

références

  1. L'état d'esprit des Rennais en 1941, vu par un médecin collaborationniste. Blog de Kristian Hamon. - 29 juillet 2017
  2. Fête de Jeanne d'Arc du 11 mai 1941 : des Rennais manifestent
  3. 17 juin 1941 : manifestation rennaise
  4. L'état d'esprit des Rennais en 1941, vu par un médecin collaborationniste. Blog de Kristian Hamon. - 29 juillet 2017
  5. L'hôpital pour prisonniers Jean Macé au temps de la libération
  6. Rennes pendant la guerre, chroniques de 1939 à 1945, par Étienne Maignen. Éditions Ouest-France - 2013
  7. De Gaulle à Rennes
  8. * Notes d'un vieux rennais pendant les jours précédant la libération de Rennes