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[[Fichier:Rue_saintgeorges_8_et_10.jpg|200px|right|thumb|Imposant immeuble à pans de bois, n° 8 et 10 , logis en masarde de mlle Quérret - (de Wikimedia Commons)]] | [[Fichier:Rue_saintgeorges_8_et_10.jpg|200px|right|thumb|Imposant immeuble à pans de bois, n° 8 et 10 , logis en masarde de mlle Quérret - (de Wikimedia Commons)]] | ||
==== En mansarde, rue Saint-Georges ==== | |||
Mlle Quéret, 48 ans, habitait deux chambres en mansarde dans la maison noire et délabrée du n°10 de la [[ rue Saint-Georges]] <ref>le bel immeuble occupé par la grande librairie le Failler </ref> et y exerçait l’activité de tailleuse avec deux apprenties, menant une vie modeste, et le journal l’''Ouest-Eclair'' <ref>''Ouest-Eclair'' du 3 novembre 1935 </ref> rapporte son action sous le titre : | Mlle Quéret, 48 ans, habitait deux chambres en mansarde dans la maison noire et délabrée du n°10 de la [[ rue Saint-Georges]] <ref>le bel immeuble occupé par la grande librairie le Failler </ref> et y exerçait l’activité de tailleuse avec deux apprenties, menant une vie modeste, et le journal l’''Ouest-Eclair'' <ref>''Ouest-Eclair'' du 3 novembre 1935 </ref> rapporte son action sous le titre : | ||
« Un coup d’audace , une émule de Mme de Lavalette ». C’est donc d’une aide à une évasion qu’il s’agit puisque, grâce à son épouse, le comte de Lavalette, ancien aide de camp de l’empereur auquel il était resté fidèle, traduit devant la cour d’assises pour conspiration avait été condamné à mort le 21 novembre 1815, recours en cassation rejeté, n’ avait pas obtenu pas la grâce de Louis XVIII trop heureux de répondre aux exigences des Ultras . Mais la veille de l’exécution, Madame de Lavalette et sa fille rendirent visite à leur mari et père. Lavalette échangea ses vêtements avec ceux de son épouse et sortit au bras de sa fille, incognito, un mouchoir lui dissimulant le visage. | « Un coup d’audace , une émule de Mme de Lavalette ». C’est donc d’une aide à une évasion qu’il s’agit puisque, grâce à son épouse, le comte de Lavalette, ancien aide de camp de l’empereur auquel il était resté fidèle, traduit devant la cour d’assises pour conspiration avait été condamné à mort le 21 novembre 1815, recours en cassation rejeté, n’ avait pas obtenu pas la grâce de Louis XVIII trop heureux de répondre aux exigences des Ultras . Mais la veille de l’exécution, Madame de Lavalette et sa fille rendirent visite à leur mari et père. Lavalette échangea ses vêtements avec ceux de son épouse et sortit au bras de sa fille, incognito, un mouchoir lui dissimulant le visage. | ||
==== Une couturière engagée ==== | |||
Mlle Quéret, née à Evran d’un père médecin, royaliste avéré, qui avait soigné les chouans blessés avait narré ses actions à sa fille qu’il avait laissée sans fortune. Celle-ci, de haute taille et de visage énergique, trouva en septembre 1832 l’occasion d’agir dans le sillage de son père. On venait de transférer à la [[prison Saint-Michel]], l’ancien chef de bataillon Guillemot, fils de {{w|Pierre Guillemot}}, l’un des principaux chefs chouans du Morbihan surnommé le « Roi de Bignan » qui avait œuvré aux côtés de Cadoudal. Lucien Guillemot a été condamné à la détention à perpétuité. Entré dans l’armée sous la Restauration, il avait, lors de la révolution de juillet, voulu servir le roi Charles X et avait entretenu dans l’ouest un retour de chouannerie dont tenta de profiter la {{ w|duchesse de Berry}}. Les légitimistes, nombreux à Rennes, avaient cherché un exploit retentissant en délivrant Guillemot de sa prison et contactèrent Mlle Quéret dont ils connaissaient les convictions héritées de son père. Adolphe Orain fait état de deux soeurs Quéret. <ref> ''La Chouannerie en payx gallo''. p.80; Adolphe orain </ref> | Mlle Quéret, née à Evran d’un père médecin, royaliste avéré, qui avait soigné les chouans blessés avait narré ses actions à sa fille qu’il avait laissée sans fortune. Celle-ci, de haute taille et de visage énergique, trouva en septembre 1832 l’occasion d’agir dans le sillage de son père. On venait de transférer à la [[prison Saint-Michel]], l’ancien chef de bataillon Guillemot, fils de {{w|Pierre Guillemot}}, l’un des principaux chefs chouans du Morbihan surnommé le « Roi de Bignan » qui avait œuvré aux côtés de Cadoudal. Lucien Guillemot a été condamné à la détention à perpétuité. Entré dans l’armée sous la Restauration, il avait, lors de la révolution de juillet, voulu servir le roi Charles X et avait entretenu dans l’ouest un retour de chouannerie dont tenta de profiter la {{ w|duchesse de Berry}}. | ||
==== Elle déguise et exfiltre le chef chouan==== | |||
Les légitimistes, nombreux à Rennes, avaient cherché un exploit retentissant en délivrant Guillemot de sa prison et contactèrent Mlle Quéret dont ils connaissaient les convictions héritées de son père. Adolphe Orain fait état de deux soeurs Quéret. <ref> ''La Chouannerie en payx gallo''. p.80; Adolphe orain </ref> | |||
La cellule de {{w|Julien Guillemot}} était sous haute surveillance : elle donnait sur un passage sur lequel donnait une fenêtre de la loge du concierge. Le détenu avait droit aux visites. On réussit à faire passer à Guillemot un costume de femme et un chapeau avec voile épais, et Mlle Quéret, accoutrée de même, s’exerça à imiter la démarche et l’allure du prisonnier. Le 8 septembre, vers 17 h 00, elle se rend à la prison, passe devant les sentinelles et se rend à la loge du concierge qui ne la connait pas, mais elle constate que le concierge y est remplacé par une dame Gougeon, une ancienne voisine. Vite, elle se débarrasse, dans un coin sombre, de ces inhabituels vêtements et se présente, prétextant vouloir remettre une somme à l’aumônier pour une messe à un malheureux nommé Jean Caro, guillotiné le 28 juin sur le [[Champ de Mars]]. Mais elle constate que la fenêtre donnant sur le passage est ouverte, aussi, prétextant un mal de gorge, elle demande à la dame Gougeon de la fermer. Le prisonnier sort alors de sa cellule, la porte en ayant été ouverte par un jeune guichetier complice. Vêtu de son déguisement, le prisonnier passe sans ennui devant les sentinelles qui le voient comme la femme vêtue de noir entrée précédemment. Il quitte Rennes en cabriolet et, deux jours plus tard, il est à Jersey. Mais Julien Guillemot, dans ses lettres à mes neveux, n'écrit que deux lignes sur cette évasion rocambolesque :''Trois semaines après ma condamnation, le 9 septembre 1832, grâce aux soins prévoyants de votre tante, aux démarches actives de mes amis, et grâce surtout au courageux dévouement de Mlle Quéret, que je n'avais jamais vue, je pus m'évader de la maison de détention et retourner dans le Morbihan.'' <ref> ''Lettre à mes neveux sur la chouannerie'', p.281, Julien Guillemot. Nantes, Féllix Masseau - 1859 </ref> | La cellule de {{w|Julien Guillemot}} était sous haute surveillance : elle donnait sur un passage sur lequel donnait une fenêtre de la loge du concierge. Le détenu avait droit aux visites. On réussit à faire passer à Guillemot un costume de femme et un chapeau avec voile épais, et Mlle Quéret, accoutrée de même, s’exerça à imiter la démarche et l’allure du prisonnier. Le 8 septembre, vers 17 h 00, elle se rend à la prison, passe devant les sentinelles et se rend à la loge du concierge qui ne la connait pas, mais elle constate que le concierge y est remplacé par une dame Gougeon, une ancienne voisine. Vite, elle se débarrasse, dans un coin sombre, de ces inhabituels vêtements et se présente, prétextant vouloir remettre une somme à l’aumônier pour une messe à un malheureux nommé Jean Caro, guillotiné le 28 juin sur le [[Champ de Mars]]. Mais elle constate que la fenêtre donnant sur le passage est ouverte, aussi, prétextant un mal de gorge, elle demande à la dame Gougeon de la fermer. Le prisonnier sort alors de sa cellule, la porte en ayant été ouverte par un jeune guichetier complice. Vêtu de son déguisement, le prisonnier passe sans ennui devant les sentinelles qui le voient comme la femme vêtue de noir entrée précédemment. Il quitte Rennes en cabriolet et, deux jours plus tard, il est à Jersey. Mais Julien Guillemot, dans ses lettres à mes neveux, n'écrit que deux lignes sur cette évasion rocambolesque :''Trois semaines après ma condamnation, le 9 septembre 1832, grâce aux soins prévoyants de votre tante, aux démarches actives de mes amis, et grâce surtout au courageux dévouement de Mlle Quéret, que je n'avais jamais vue, je pus m'évader de la maison de détention et retourner dans le Morbihan.'' <ref> ''Lettre à mes neveux sur la chouannerie'', p.281, Julien Guillemot. Nantes, Féllix Masseau - 1859 </ref> | ||
==== Condamnée puis oubliée ==== | |||
Mlle Quéret quitte tranquillement son interlocutrice et, ne cherchant pas à fuir, regagne sa mansarde où la police vient la chercher le lendemain. Les ultras rennais applaudissent et se moquent de la magistrature de Louis Philippe. L'effet produit à Paris, au faubourg Saint-Germain est considérable. Mlle Quérret est traduite, le 21 octobre, devant le tribunal correctionnel, avec le concierge et le jeune guichetier complice, dans une atmosphère d’émeute, une foule demandant son élargissement. Elle seule est condamnée à cinq ans de prison, ramenés à deux par la cour royale, peine qu’elle accomplit parmi les condamnées de droit commun ; et elle refusera la grâce. | Mlle Quéret quitte tranquillement son interlocutrice et, ne cherchant pas à fuir, regagne sa mansarde où la police vient la chercher le lendemain. Les ultras rennais applaudissent et se moquent de la magistrature de Louis Philippe. L'effet produit à Paris, au faubourg Saint-Germain est considérable. Mlle Quérret est traduite, le 21 octobre, devant le tribunal correctionnel, avec le concierge et le jeune guichetier complice, dans une atmosphère d’émeute, une foule demandant son élargissement. Elle seule est condamnée à cinq ans de prison, ramenés à deux par la cour royale, peine qu’elle accomplit parmi les condamnées de droit commun ; et elle refusera la grâce. | ||
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