De Saint Méloir, chantre de la LVF
Un maréchaliste
Alain de Saint Méloir était un aristocrate quadragénaire, licencié ès-lettres, parlant couramment cinq langues dont l’allemand. Avant-guerre, il était membre de l’association des « Camelots du roi » et de « L’Action Française », dont il était un militant actif sur la région de Rennes. Bon orateur, il donnait des diatribes contre la République et prônait le régime monarchique. Mobilisé, il avait perdu un bras à Dunkerque en juin 1940 et était titulaire de la croix de guerre ainsi que de la médaille militaire avec palmes. Fait prisonnier par les Allemands le 4 juin 1940, il fut libéré au mois d’août en tant que grand mutilé.
Il est donc aussitôt derrière le maréchal Pétain, séduit par les principes directeurs de sa politique avec un régime d’autorité qu’il souhaitait bien avant la guerre. La bataille de Dunkerque avait renforcé son anglophobie. Il assiste donc à Rennes, début 1941, à la première réunion des « Amis du Maréchal » présidée par Me Chaplet[2].
Chaud partisan de la LVF
En 1942, membre du RNP , Alain de Saint-Méloir s’occupe des engagements à la LVF , la Légion des volontaires français contre le bolchevisme, dans laquelle il est entré à la suite des déclarations du Maréchal Pétain qui avait dit aux Légionnaires partant lutter contre l’U.R.S.S. : « Vous portez une part de notre honneur Militaire ». Lors de la scission du RNP, il rejoint le Mouvement Social Révolutionnaire (MSR). En juin 1942, il devient secrétaire administratif de la Légion des volontaires français contre le bolchevisme aux appointements de 1 300 F mensuels et dispose d'une secrétaire, Marie-Louise Haudouin (qui sera condamnée à mort par le tribunal militaire le 19 octobre 1944 pour avoir dénoncé quatre patriotes) ; un attentat a lieu contre le bureau du 9 rue Nationale le 4 juin 1942. Puis de Saint Méloir est nommé inspecteur régional en mai 1943 aux appointements de 7 000 F portés à 12 000 F en 1944. Le 25 juin 1943, un grand article dans l’Ouest-Eclair s’étend sur les propos de de Saint-Méloir et de « Schweller » (sic), ce croisé d’un nouveau genre venu prêcher la bonne parole et vanter l’engagement dans la LVF[3].
Mais les recrutements sont maigres au bureau du 6, Rue Du Guesclin. De Saint-Méloir collabore aussi avec le lieutenant allemand Slovenzick de la Propagandastaffel , qui le consulte pour censurer les journaux rennais[4] et impose à L’Ouest-Éclair l’insertion de ses articles qui doivent paraitre en première page, signés SM, tel celui du 20 juin 1944 sur la bataille de Caen. Il fait également partie du « Cercle d’Études National-Socialiste »[5] et reçoit chez lui, 8 bis rue Pierre Hévin des officiers allemands et des miliciens en tenue. Il pratiquait aussi la délation car on trouva à la Libération, au siège du SD, des lettres de dénonciation en partie brulées portant son N° : SR 777[6]. Les locaux de la rue Nationale étant trop exigus, la LVF fait réquisitionner par les Allemands un appartement de 7 à 8 pièces, situé au-dessus des galeries du Théâtre et du « Grand Café Glacier » et Alain de Saint-Méloir et sa secrétaire, une nommée « Lydia », s’y installent.
Le 7 mai 1944, des Rennais applaudiront au théâtre municipal, deux légionnaires de la LVF, présentés par M. de Saint-Méloir : M. Després et le capitaine Bassompierre venus faire de la propagande. En juin, à la suite des bombardements, comme il n’y avait plus d’émissions de Rennes-Bretagne et que l'écoute de Radio-Paris était devenue difficile, Slovenzick demanda à de Saint-Méloir de diffuser quotidiennement les nouvelles militaires allemandes par haut-parleurs à certains points de la ville. Le 19 juin, il signe l'éditorial de l'Ouest-Eclair sur le débarquement, écrivant : "voulu et payé par les puissances financières juives, maîtresses des démocraties, cet assaut donné, non plus seulement à la France, mais, par delà, à l'Europe, vise à replacer notre continent sous le joug des maîtres de l'or."
Le délégué régional de la LVF sera condamné aux travaux forcés à perpétuité.