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Théophile Julien Lognoné
Théophile Julien Lognoné
Né le 27 juillet 1895, Dol-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine) et décédé 4 septembre 1974, La Gouesnière (Ille-et-Vilaine)
Bijoutier-horloger qui a fondé les industries Probiomer. Décoré de la Croix de Verdun, il fut prisonnier à Douaumont, le 4 mars 1916. La veille de la signature de l'armistice le 10 novembre 1918, il envoie une lettre émouvante à ses parents : Théophile Joseph Lognoné et Anne-Marie Dolon, alors qu'il est prisonnier en Allemagne.
En 1940, bien qu’exempté de toutes obligations militaires, en raison de charges de famille, Théophile Lognoné fut volontaire à l’usine d’aviation Breguet, en qualité de mécanicien de précision, ce qui lui rappela sa première profession, celle d’horloger. Les temps pionniers de l'aviation sont nés dans des hangars à bateaux avec les premiers hydravions en bois et en tissu.
Les fondateurs de Breguet Aviation étaient eux-mêmes descendants d'un horloger, Abraham-Louis Breguet, né à Neuchâtel le 10 janvier 1747 et mort à Paris le 17 septembre 1823, horloger et physicien français d'origine neuchâteloise, actif à son compte à Paris depuis 1775, nommé horloger de la marine et artiste adjoint au Bureau des Longitudes en 1815, et membre de l'Académie des sciences en 1816.
Passionné de découvertes, Théophile Lognoné a reconverti des micro-techniques d'horlogerie pour exploiter des minéraux marins et développer de recherches appliquées au domaine de la nutrition-santé.
Sa vision de l'innovation transmanche[1] a fait l'objet de recherches et de conférences[2], dans le cadre du jumelage entre Rennes et Exeter[3], tout comme les liens de recherche et d'innovation avec des communes du territoire (canal de Betton[4], Saint-Grégoire et son moulin de la Charbonnière[5]).
Des débuts dans l'horlogerie à l'invention active, la vie d'un innovateur
Les motivations pour la recherche et l'innovation
Pour éviter une concurrence directe avec son frère horloger parti s’installer à Tours (Loir-et-Cher), la bijouterie-horlogerie de Théophile Lognoné choisit comme emplacement historique : la rue Grande-Rue-des-Stuarts à Dol-de-Bretagne.
La vitrine principale était consacrée à la marque suisse Zenith[6], dont Théophile Lognoné était l'un des détaillants. Aujourd'hui propriété du groupe de luxe LVMH, la marque Zenith fut récompensée par le Grand prix de l'Exposition universelle de 1900.
Parmi les personnalités ayant porté une montre Zénith[7], figure notamment le guide Gandhi. Cette montre de poche en argent était devenue l'une de ses rares possessions matérielles et accompagnait son quotidien, signalant notamment ses heures de prière grâce à une fonction d'alarme.
Elle accompagna aussi Louis Blériot[8] lors de sa traversée de la Manche ainsi que d’autres pionniers de l’aviation dans leurs exploits, leur offrant un garde-temps précieux et précis malgré les conditions extrêmes de l’aviation. La marque Zenith fut fondée en 1865 par Georges Favre-Jacot qui sera le premier en territoire suisse à imaginer et à bâtir de vastes et lumineux bâtiments dédiés à l'horlogerie où le travail est contrôlé de bout en bout et industrialisé en s'inspirant du modèle de la Waltham Watch Company. Georges Favre-Jacot avait perçu les changements qui s'opéraient dans l'industrie horlogère, en particulier aux États-Unis où étaient construites des manufactures entièrement intégrées. Il s'informe et lit notamment le rapport de Jacques David lors de sa visite à l'Exposition universelle de Philadelphie en 1876.
En Suisse, l’horlogerie s’est implantée au milieu du XVIe siècle à Genève, où s’étaient réfugiés de nombreux protestants français et italiens. En 1541, le réformateur protestant français établi à Genève Jean Calvin interdit le port d’objets ornementaux, forçant les orfèvres et joailliers à se tourner vers un autre art, à savoir celui de l’horlogerie[9].
Une formation technique à peine esquissée mais d'où naissent des passions
Théophile Lognoné observe dans la baie du Mont-Saint-Michel que les brisures de coquillages produisent des richesses nutritionnelles pour renforcer le calcium de coquilles d’œuf[10].
L’orfèvre observe alors les propriétés du calcium organique vivant. Ce minéral, présent dans le sable coquillier de la baie du Mont-Saint-Michel, permet de fertiliser des sols et d'améliorer la recherche en nutrition-santé[11].
Théophile Lognoné va utiliser des micro-techniques d'horlogerie (réparation de montres-bracelets) pour exploiter ces minéraux marins. Pour accompagner ses découvertes, il se porte acquéreur d'un bateau : le Saint-Pierre, dont le nom faisait en référence à Césarée (Caesarea), l'ancien nom antique de Jersey qui était associé à différents personnages du Nouveau Testament : Pierre, Paul, Hérode, Pilate. Le nom Césarée pour désigner Jersey fut maintenu jusqu'à ce que l'Empire Romain se christianise et devienne Andium, forme latinisée désignant « la très grande (île) ». Jersey se trouvant bien être la plus grande des îles mentionnées dans l’Itinéraire d’Antonin qui se situe entre Aurigny et Ouessant.
Les débuts de l'aventure industrielle : une implication totale, un travail acharné
Pour réussir son pari, Théophile Lognoné pose les bases d'une entreprise familiale[12]. Il entend que le savoir-faire soit transmis de père en fils, de génération en génération pour innover. “Nous ne sommes pas une génération d’héritiers, nous sommes une génération d’entrepreneurs”. Il accorde une importance à la prospective et à la recherche appliquée : "L’horlogerie a besoin d’OPA : Oser, Préparer et Anticiper le monde de demain".
Il nourrit une culture de propriété industrielle avec des brevets. L'ensemble de ses procédés sont brevetés avant de les industrialiser. Enfin, il entend s'appuyer sur une forte émulation locale pour décloisonner l’innovation. La valorisation de nouvelles ressources liées à la mer a longtemps rythmé l'économie locale des cités corsaires de Granville et Saint-Malo.
Il observe avec intérêt le fonctionnement des usines Dior dans le négoce puis la fabrication d'engrais naturels. Pionnière de l'importation des guanos du Pérou et de la fabrication du guano dissous, la maison Dior a été aussi la première à vulgariser en France l'emploi des scories de déphosphoration qui sont mélangées à l'acide sulfurique . En 1860, celle-ci avait obtenu le marché de la récolte des boues domestiques de Granville, qu'elle revendait aux agriculteurs une fois transformées et fermentées.
La crise de 1936 renforce l'entreprise
Pendant la crise de 1936, sa découverte est récompensée par la prime d’honneur du ministère de l’agriculture. Il vient alors d'inventer un complément alimentaire naturel, capable de renforcer le calcium de coquilles d'œufs et d’approfondir de nouvelles recherches pour demain[13].
Il y rend alors un hommage à l’œuvre de Victor Hugo, les Travailleurs de la Mer lors de son exil à Guernesey, dans lequel l'écrivain imagine la figure d'un roi Auxcrinier de l'Océan, qui aurait trouvé le bonheur dans ses États ; la constitution, dont il est l'auteur, refuse le droit d'entrée à l'or et à l'argent sans son autorisation : la seule monnaie ayant cours est le coquillage dont la mer est l'inépuisable coffre-fort.
L'intérêt porté au calcium de l’œuf par Théophile Lognoné, bijoutier-horloger, a été salué dans la mesure les œufs sont considérés comme des chefs-d'œuvre de la joaillerie. Les détails et le design qui les associent ont nourri un capital de créativité et d'imagination. L'Œuf à la poule est un œuf de Fabergé impérial, le premier d'une série de cinquante-deux, réalisé sous la supervision de Pierre-Karl Fabergé pour la famille Impériale Russe. La tsarine et tsar avaient tellement apprécié l'œuf qu'Alexandre III en commanda un nouveau pour sa femme à chaque période de Pâques.
Les œufs symbolisent aussi « l’amour éternel » de Marc-Antoine pour Cléopâtre.
Les réseaux de science et d'innovation, indispensables à la genèse de découvertes
L'entreprise va appuyer son développement depuis la Bretagne vers la Suisse, l’Allemagne, le Royaume-Uni.
Elle va aussi cultiver des partenariats atypiques : dans l'Allier, en particulier avec les moines de l'abbaye de Sept-Fons qui fabriquent la "Germalyne".
Théophile Lognoné va aussi développer des relations épistolaires avec la biologiste, Lucie Randoin, (1888-1960). Agrégée de sciences naturelles en 1911, à une époque où l’agrégation était réservée aux hommes, puis docteur ès sciences en 1918, elle est la première femme à enseigner en Sorbonne et rejoindre l'Académie de médecine.
Après le décès de Marie Curie en 1934, aucune femme n’est entrée à l’Académie de médecine avant Lucie Randoin. Un siècle plus tard, la place des femmes dans les institutions médicales reste congrue.
Les travaux de cette scientifique oubliée au parcours très atypique ont permis de développer des filières du territoire entre terre et mer [12]. Ses publications scientifiques ont permis de valoriser les apports de coquillages et minéraux marins.
En 1944, elle a conservé des sérums et vaccins de l'Institut Pasteur dans des sous-sols pour la Résistance. Avec la grande bascule de la pharmacie de la recherche chimique vers la biotechnologie, l’essentiel des nouveaux médicaments est issu en tout ou partie de travaux académiques.
Les villes-ports : une stimulation supplémentaire
D’importantes pénuries de coquillages en 1967 pour l’alimentation pour bétail ont conduit les industries Probiomer à s’approvisionner en farine de manioc de Madagascar auprès d’importateurs.
Le rôle des ports (Saint-Malo, Nantes, la Rochelle, Granville, Honfleur, Le Havre, Dunkerque, Marseille) a été décisif comme lieu d’innovation dans le domaine de la nutrition-santé.
Avec l'exemple du Hangar à Bananes, situé quai des Antilles à Nantes, la ville de Nantes a reconnu l'importance des industries Probiomer [13] comme une boite à idées pour faire de Nantes une « Babylone » de l’agroalimentaire et du consommer autrement entre terre et océan.
Ce mouvement sera suivi par plusieurs figures du syndicalisme agricole. Un paysan Bouguenaisien encore très jeune, Henri Robichon, fondera l’Union des Syndicats Agricoles de Loire-Inférieure, connue pour son journal La Terre Nantaise. Il sera président de la coopérative agricole de Nantes.
Pour témoigner de cette évolution, des villes ports ont développé des outils de prospective comme la « Toile de la transition agricole et agroalimentaire» qui est présentée à la Halle aux sucres à Dunkerque.
En 1953, le premier service de diététique a été créé à l'Hôtel-Dieu de Marseille.
Après les changements du monde agricole d’après guerre, l’idée de se regrouper pour être innovant paraît de plus en plus pertinente.Ces villes-ports ont parfois joué un rôle de tiers-lieux maritimes précurseurs.
A ce titre, le Commissariat aux Transports Maritimes et à la Marine Marchande avait imaginé des programmes très ambitieux pour positionner les ports comme incubateurs-tremplin de l’économie circulaire. Ils représentaient une pièce d’un grand plan pour moderniser la France d'après-guerre, traumatisée par les pénuries alimentaires et aiguillonnée par l’avance des britanniques dans ce domaine. Pour rattraper son retard, la France voulait se doter de filières ultra modernes d’approvisionnement.
Quelques inventions et découvertes majeures
Le calcium organique vivant
Ses travaux en nutrition ont ainsi aidé la filière avicole de la baie du Mont-Saint-Michel et des îles anglo-normandes, car les œufs étaient beaucoup plus résistants pour les transports et les ventes.
La production pouvait ainsi être acheminée par voie de chemin de fer pour rejoindre les Halles de Paris.
Le rôle des minéraux marins dans la nutrition-santé
Théophile Lognoné a soutenu les filières de pêche, en particulier les pêcheurs de grand fond en quête de produits sains et naturels : comme la pêche à la morue au large de Terre-Neuve, le saumon de Norvège ou encore la Plasma de Quinton. Sans oublier l'économie du sel (Noirmoutier, Oléron, Guérande, île de Ré, baie du Mont-Saint-Michel). Son héritage scientifique a contribué à établir l’importance primordiale d’une alimentation naturelle et équilibrée sur notre santé.
Lucie Randoin a apporté une aide précieuse aux industries Probiomer grâce à son expertise en recherche fondamentale pour explorer le potentiel des richesses nutritionnelles des minéraux marins.
Hommages
Théophile Lognoné a été décoré de la Croix de Verdun, pendant la Première Guerre mondiale.
Ses découvertes et innovations ont donné lieu à un cycle de conférences à l'occasion de la France Design Week[14].
Une conférence sur l'innovation transmanche a été organisé en partenariat avec la Maison internationale de Rennes, dans le cadre du jumelage entre Rennes et Exeter.
L'article colombien Rafa Padilla a réalisé plusieurs tableaux sur les innovateurs de la baie du Mont-Saint-Michel, en rendant hommage à Théophile Lognoné.
Un projet de court-métrage "Les AVATARS de la Grande Rue des Stuarts" est en cours de construction par le réalisateur Camerounais Cidic Frank Mboumi.
Bibliographie
Un ouvrage "Les Avatars de la Grande rue des Stuarts" présente l'aventure des industries Probiomer lancées par Théophile Lognoné. Une version existe aussi en anglais ("The Avatars of the Stuarts' Main Street").
Un appel en faveur de la conception d'un timbre à l'effigie de la biologiste Lucie Randoin, a été lancé auprès de Philaposte, filiale du groupe La Poste chargée de l'émission de nouveaux timbres, au titre des échanges et relations épistolaires avec Théophile Lognoné et d'autres innovateurs.
Généalogie et patronyme
Le patronyme "Lognoné" a des origines corsaires qui remontent à Guillaume Le Monnier ayant appartenu à la 4e classe de Cancale (registre des classes de 1670). Plusieurs générations de corsaires trempaient des boulets de canon dans de l'oignon : un anticoagulant naturel pour faire saigner les blessures de l'adversaire. Ce stratagème psychologique a permis de repousser des coalitions montées et financées par des puissances ennemies.
La Place aux Oignons à Lille (Nord) a occupé une fonction stratégique dans la défense de la ville. The Onion (« L'Oignon ») est un média d'informations américain.
L'Ognon est une rivière française des départements de la Vendée et Loire-Atlantique. C'est aussi le nom d'une rivière située dans l’est de la France en région Bourgogne-Franche-Comté, dans les départements de la Haute-Saône, du Doubs, du Jura et de la Côte-d'Or.
Le patronyme "Lognoné" s'est écrit aussi "Lognonné". Il est porté par Philippe Lognonné, géophysicien à l’institut de physique du globe de Paris, professeur à l’Université Paris Diderot, responsable scientifique du sismomètre embarqué par la sonde Insight qui s’est posée sur Mars lundi 26 novembre 2018.
Notes et références
« Fichier des personnes décédées », data.gouv.fr, Insee, année 1974. « Acte de décès n° 9 - État-civil de La Gouesnière - Fichier des personnes décédées », data.gouv.fr, Insee, année 1974. Fiche : « Théophile Lognoné », Généanet, site internet, 2022 « Sud-Manche. Il a valorisé les liens entre terre et mer », Ouest-France, site internet, 24 juillet 2020 (voir en ligne) Probiomer, Vie naturelle', numéro 17, printemps 1970
- ↑ https://www.facebook.com/watch/?v=443218306985745
- ↑ https://twitter.com/contact_mir/status/1362352687455559680
- ↑ https://www.mir-rennes.fr/index.php/evenements/308-visio-conference-probiomer-les-secrets-d-un-savoir-faire-horloger-transmanche-inscrit-a-l-unesco?date=2021-03-11-14-30
- ↑ https://www.ouest-france.fr/bretagne/betton-35830/un-timbre-a-leffigie-de-la-biologiste-lucie-randoin-a7f0c2a2-30ec-4184-bb06-85c66b12b305
- ↑ https://rennes.maville.com/actu/actudet_--saint-gregoire.-le-savoir-faire-horloger-explique-par-un-historien-ce-jeudi-apres-midi-_7-4533703_actu.Htm
- ↑ https://www.zenith-watches.com/fr_fr/brand/heritage
- ↑ https://www.zenith-watches.com/fr_fr/brand/heritage
- ↑ https://www.zenith-watches.com/fr_fr/brand/heritage-louis-bleriot
- ↑ https://ich.unesco.org/fr/RL/les-savoir-faire-en-mcanique-horlogre-et-mcanique-d-art-01560
- ↑ https://www.ouest-france.fr/normandie/granville-50400/sud-manche-il-a-valorise-les-liens-entre-terre-et-mer-6917073
- ↑ https://fr.calameo.com/books/006557157fd24700327c6
- ↑ https://fr.calameo.com/books/006557157fd24700327c6
- ↑ https://fr.calameo.com/books/006557157fd24700327c6
- ↑ https://fr.calameo.com/books/006557157fd24700327c6