« Amand Bazillon résistant » : différence entre les versions

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Un cultivateur (1) trouve dans un de ses champs à ''Pont-Lagot'', (le certificat de décès désigne  ''Bel Air''), commune de Vezin-le-Coquet, un homme sans vie, celui d’Amand Bazillon, 20 ans. Il charge le corps sur une charrette et le transporte à la mairie-école, l’unique endroit public qui offre une place pour déposer provisoirement le défunt. Du haut de mes six ans et demi je regarde avec une grande curiosité ce cadavre qui ne m’effraie ni ne m’impressionne. Je le regarde comme un évènement du moment, que la guerre produit. Depuis cinq années que cette guerre durait, depuis quasiment toujours pour moi, curieux, j’écoute les conversations des adultes avec beaucoup d’attention, elles emplissent ma tête d’informations sur les évènements de la guerre, j’essaie de les concrétiser en les imaginant avec tous les fantasmes que peut produire l’esprit d’un enfant. Je les mets en scène sans en avoir vu l’authentique déroulement. La vie me conditionne. Ainsi les évènements qui se produisent, les situations, les conversations des adultes participent progressivement sans doute à me préparer afin d’affronter sans émotion la vue du premier mort que ma jeune existence rencontre.
Un cultivateur (1) trouve dans un de ses champs à ''Pont-Lagot'', (le certificat de décès désigne  ''Bel Air''), commune de Vezin-le-Coquet, un homme sans vie, celui d’Amand Bazillon, 20 ans. Il charge le corps sur une charrette et le transporte à la mairie-école, l’unique endroit public qui offre une place pour déposer provisoirement le défunt. Du haut de mes six ans et demi je regarde avec une grande curiosité ce cadavre qui ne m’effraie ni ne m’impressionne. Je le regarde comme un évènement du moment, que la guerre produit. Depuis cinq années que cette guerre durait, depuis quasiment toujours pour moi, curieux, j’écoute les conversations des adultes avec beaucoup d’attention, elles emplissent ma tête d’informations sur les évènements de la guerre, j’essaie de les concrétiser en les imaginant avec tous les fantasmes que peut produire l’esprit d’un enfant. Je les mets en scène sans en avoir vu l’authentique déroulement. La vie me conditionne. Ainsi les évènements qui se produisent, les situations, les conversations des adultes participent progressivement sans doute à me préparer afin d’affronter sans émotion la vue du premier mort que ma jeune existence rencontre.


[[Fichier:Acte de décès d'Amand Bazillon Vezin le Coquet.jpg right thumb]]
[[Fichier:Acte de décès d'Amand Bazillon Vezin le Coquet.jpg]]


Les commentaires concernant ce martyr vont bon train dans le village. Le nom de la Milice est immédiatement évoqué. On en parle bien sûr à la maison. Les enfants commentent aussi, entre eux, à leur façon, ce tragique évènement. J’ai imaginé longtemps qu’il s’agissait d’un résistant ayant participé au plastiquage du pylône électrique. Celui qui achemine le courant vers le transformateur de ''la Belle-Epine'', tout près du lieu où est installée une batterie de DCA allemande. Ce pylône affalé après destruction est un formidable terrain de jeux, un immense mécano, propice à l’escalade. Je me persuade que c’est lui, Amand,  le héros qui a détruit le pylône pour empêcher les Allemands d’éclairer les avions alliés lors de leurs passages au dessus de nos têtes, avions qui allaient bombarder Nantes ou Saint-Nazaire. Pendant 65 ans j’ai voulu croire à cette histoire, celle que je m’étais forgée enfant, qui me semblait tellement bien coller à la réalité des évènements du moment.  
Les commentaires concernant ce martyr vont bon train dans le village. Le nom de la Milice est immédiatement évoqué. On en parle bien sûr à la maison. Les enfants commentent aussi, entre eux, à leur façon, ce tragique évènement. J’ai imaginé longtemps qu’il s’agissait d’un résistant ayant participé au plastiquage du pylône électrique. Celui qui achemine le courant vers le transformateur de ''la Belle-Epine'', tout près du lieu où est installée une batterie de DCA allemande. Ce pylône affalé après destruction est un formidable terrain de jeux, un immense mécano, propice à l’escalade. Je me persuade que c’est lui, Amand,  le héros qui a détruit le pylône pour empêcher les Allemands d’éclairer les avions alliés lors de leurs passages au dessus de nos têtes, avions qui allaient bombarder Nantes ou Saint-Nazaire. Pendant 65 ans j’ai voulu croire à cette histoire, celle que je m’étais forgée enfant, qui me semblait tellement bien coller à la réalité des évènements du moment.  
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