Rue Camille Pelletan
La rue Camille Pelletan relie, à Rennes, la rue Rapatel, au nord, à la rue de Vern, au sud. Cette voie fut dénommée par délibération du conseil municipal de la Ville de Rennes le 11 décembre 1931.
Cette dénomination rappelle :
Camille Pelletan
(28 juin 1846, Paris - 4 juin 1915, Paris)
Charles Camille Pelletan, après l'École des chartes, diplômé en droit, ami des poètes du Parnasse contemporain (Léon Valade, Émile Blémont, Charles Cros, Paul Verlaine…), devient à vingt ans un journaliste très critique du régime de l'empereur Napoléon III, notamment à La Tribune et au sein du journal hugolien Le Rappel. Il est franc-maçon. Après la guerre de 1870, il est l'un des principaux meneurs des radicaux « intransigeants » et s'oppose avec Clemenceau aux républicains « opportunistes » qui suivent Léon Gambetta. À partir de 1879, il travaille avec succès à l'amnistie des communards. Il devient rédacteur en chef du journal de Clemenceau, La Justice. En juillet 1885, il s'oppose à Jules Ferry en se déclarant adversaire de toute expansion coloniale. Il mène ensuite le combat contre le général Boulanger.
Député de 1881 à 1912, puis sénateur des Bouches-du-Rhône de 1912 à 1915, il était devenu membre du Parti radical-socialiste dès sa création en 1901 et en incarne l'aile la plus avancée, dénonçant la « nouvelle féodalité industrielle », mais il n'est pas collectiviste, attaché qu'il est au principe de la propriété individuelle. Il milite pour l'établissement de l'impôt progressif sur le revenu qui déchargera les travailleurs et le monde rural et la réforme de la contribution foncière et des taxes qui immobilisent la propriété rurale.
Après l'affaire Alfred Dreyfus, il est ministre de la Marine de juin 1902 à janvier 1905 dans le cabinet Combes. Il freine la construction des cuirassés décidée lors du « programme de 1900 » et multiplie le nombre des torpilleurs et des sous-marins et créé le corps des administrateurs des Affaires Maritimes. Il favorise les carrières des jeunes officiers issus de familles modestes, des officiers sortis du rang et des officiers mécaniciens, jusqu'alors méprisés par ceux issus de l'École navale. Il introduit la journée de huit heures dans les arsenaux. Durant les grandes grèves de Marseille en 1904, il montre une sympathie prononcée pour les revendications et les méthodes socialistes des grévistes.
Sa politique est très critiquée, y compris par les radicaux entrés en dissidence contre le gouvernement Combes et il devient une cible pour les caricaturistes, qui moquent sa pilosité broussailleuse et son manque d'élégance. Ses adversaires s'inquiètent du risque d'affaiblissement de la Marine et de destruction de la discipline. La commission d'enquête extra-parlementaire fait long feu.
L'action de Camille Pelletan en tant que Ministre de la Marine reste très critiquée parmi les milieux militaires maritimes. Son application des théories de l'amiral Aube, a en effet conduit à remplir les ports français et algériens, de petits torpilleurs pour partie incapables de mener à bien des missions en haute mer. Ses décisions contribuèrent ainsi au retard que la Marine française accumula à partir du milieu des années 1880. En 1919, l'amiral américain Bradley A. Fiske écrivit, dans son autobiographie :
« Au lieu d’être un ami du peuple, comme beaucoup de Français se complaisent à le voir, Camille Pelletan, de par son action, s'est révélé plus dangereux, pour eux, que tous les espions allemands réunis. Le ministère de Camille Pelletan aura plus sûrement éreinté la défense de la République Française que 500 000 soldats allemands ne l’auraient fait ! » — (From midshipman to rear admiral)
Très anticlérical, il vote la séparation de l'Église et de l'État. Il se montre un défenseur ardent de la stratégie du bloc des gauches (« pas d'ennemi à gauche »). Président du parti radical en 1906-1907, à nouveau candidat en 1913, il est battu par Joseph Caillaux. Il vécut une trentaine d'années en concubinage avec une femme excentrique, grande amie des poètes et hommes de lettres, Juliette Philippe. Après son décès, il se marie tardivement, en 1903, alors qu'il est ministre, avec une jeune institutrice de 24 ans sa cadette. [1]