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Rue Ambroisine Garnier-Leray
La rue Ambroisine Garnier-Leray (Straed Ambroisine Garnier-Leray ) est située dans la partie rennaise de l'Écopôle sud-est. Elle relie la rue des Veyettes au sud-ouest à la rue de la Frébardière au nord-est et traverse un nouveau village d'entreprises apparu en 2021[1]. Elle a été ainsi dénommée par délibération du conseil municipal du 1er avril 2019 pour rendre hommage à :
Ambroisine Garnier-Leray
Dirigeante de la mercerie rennaise "la Fée" (19 septembre 1863, Rennes –27 décembre 1928, Rennes)
Ambroisine, Marie Leray est née à Rennes, rue Saint-Melaine, l'aînée dans une famille de quatre enfants. Son père Ambroise Leray, bourrelier, sellier est issu d'une famille catholique de onze enfants, originaire de Châteaugiron. Il est considéré comme le communard, dans une fratrie où le frère aîné est archevêque à la Nouvelle-Orléans et quatre sœurs sont religieuses. Ambroise Leray et son épouse Françoise quittent Rennes avec leurs deux premiers enfants et vont s'installer à Vitré où vont naitre les deux autres.
Ambroisine y passe son enfance et débute très jeune comme apprentie dans une mercerie de gros de la ville. Le personnel y est nourri et logé sur place. Tout son temps est consacré au travail. Pour se rendre aux marchés de Fougères et de Janzé, il faut se lever à quatre heures du matin et le retour s'effectue entre vingt heures et vingt-deux heures. La patronne de la mercerie trouve très naturel que ses employées consacrent leur temps à leur travail. Malgré ce dur apprentissage, Ambroisine Leroy gravit tous les échelons de la hiérarchie et lui forge une expérience qui va lui permettre de fonder sa propre entreprise.
L'oncle d'Amérique, François-Xavier Leray nommé le troisième archevêque de la Nouvelle-Orléans, dans l'État de Louisiane, ancienne colonie française, décède à Chateaugiron, en septembre 1887, après un passage à Rome. La Louisiane, vendue en 1803 par Napoléon aux États-Unis, en devient le 18e état. C'est le premier et seul état de majorité non anglophone. L'Archevêque François-Xavier Leray laisse un héritage de 2 500 francs à chaque neveu et nièce. Ambroisine emprunte cet héritage à son frère et ses sœurs. Avec 10 000 francs, elle crée, en 1890, une mercerie à l'angle de la place et de la rue Hoche. Elle réalise alors son rêve d'avoir son propre magasin auquel elle donne le nom de : A la Ville de Rennes, Voiles et blancs. Très rapidement, Ambroisine fait prospérer son affaire.
Son frère François, le filleul de l'archevêque, ancien élève de l'École Normale est devenu instituteur à l'école du boulevard de la Liberté. Il fréquente les restaurants branchés de Rennes où se retrouvent fréquemment d'anciens élèves de l'École Normale. Parmi eux se trouve un camarade avec qui il a sympathisé durant ses années de formation, Julien Garnier qui après avoir été instituteur à Châteaugiron et à Fougères, a été nommé à l'école du boulevard Laënnec. Depuis leur retour à Rennes, ils se voient régulièrement. Julien Garnier qui a fait la connaissance de la sœur de son ami, devient un client régulier de la Mercerie de la rue Hoche. Régulièrement le dimanche matin, il se présente au magasin, qui est ouvert, avec un bouquet de violette à la main. L'après-midi en compagnie d'amis, ils effectuent de longues promenades. Le 2 janvier 1897, Ambroisine Leray (34 ans) épouse Francis Garnier (30 ans), à la mairie de Rennes. La cérémonie religieuse, à Notre-Dame, est célébrée par Louis Garnier, le frère du marié, vicaire général du diocèse. Le premier enfant du couple, né en octobre 1897, décède quinze jours plus tard. Quatre autres enfants vont naître entre 1900 et 1907.
Son frère l'instituteur François Leray, en 1899, lors du second procès du Capitaine Alfred Dreyfus à Rennes, fréquente le milieu Dreyfusard. Avec ses amis, Charles Bougot, Charles Müller[2] et Francis Delaisi, ils se retrouvent régulièrement à l'Auberge des Trois Marches autour du Professeur Victor Basch, Georges Dottin[3] et Henri Sée[4]. François Leray est l'un des co-fondateurs de la section rennaise de la Ligue des Droits de l'Homme, créée lors du procès. François Leray qui parle plusieurs langues va plus tard enseigner à Rennes, l'italien, l'allemand, le russe, l'espagnol…
Dès leur mariage, Julien Garnier s'associe au travail du magasin. Il partage son temps entre l'école et le commerce. Place Hoche, le couple est un peu à l'étroit et l'habitation est un peu vétuste. De plus, c'est plutôt une clientèle de quartier et sans grande possibilité d'évolution, c'est pourquoi ils se mettent à prospecter un autre lieu. Une opportunité se présente au 5 rue d'Estrées, un bel emplacement à deux pas de l'Hôtel de Ville, dans un dépôt de vin en train de péricliter. C'est là qu'est fondé le magasin "A la Fée". Un magasin qui va devenir connu et très fréquenté. On vient de loin pour s'y ravitailler. "A la Fée" est une maison spécialisée dans les fournitures pour la mode et la couture : Mercerie, passementerie, soieries, doublures, rubans et dentelles. A cette époque la concurrence est rude, beaucoup de commerces familiaux rennais ferment. Pour réussir, Ambroisine Garnier-Leray sait qu'il faut avoir du stock et présenter des produits diversifiés. C'est pourquoi Julien Garnier se rend à l'Exposition Universelle de Paris, en 1900. Il veut y découvrir toutes les évolutions et toutes les nouveautés sur : la bonneterie, la ganterie, les articles tricotés, la réapparition du Jersey et les nouveaux tissus qui sont irrétrécissables au lavage. Le secret de la réussite de l'entreprise est sa bonne gestion et un bon réseau de couturières.
De 1899 à 1928, la Maison Garnier-Leray qui a beaucoup prospéré va pouvoir s'agrandir en achetant des locaux voisins disponibles. La famille s'est installée dans une propriété du faubourg de Fougères, à Maurepas. En 1913, l'instituteur, Julien Garnier quitte l'enseignement pour se consacrer, avec son épouse, à la mercerie "A la Fée".
Le couple fréquente beaucoup le milieu intellectuel de Rennes, dont Isidore Louveau[5], Professeur honoraire à l'École de médecine et de pharmacie, témoin de leur mariage, mais également les maris des sœurs d'Ambroisine, Emmanuel Philipot et Armand Rébillon[6] tous les deux professeurs à la faculté des Lettres.
En 1927 et 1928, la réussite de l'entreprise est visible. Tout le magasin est réaménagé et la devanture de "A la Fée" est complètement refaite avec une alliance de marbre, de mosaïques et de fer forgé. Les travaux de mosaïque sont confiés à Isidore Odorico. Malheureusement, Ambroisine Garnier-Leray, cette femme de caractère, ne va pas profiter de ce nouvel aménagement car elle décède de maladie, le 27 décembre 1928, à Rennes. Son mari Julien Garnier, l'instituteur devenu commerçant va gérer le magasin jusqu'en 1936, date à laquelle son fils, Jean, prend la succession. Une longueenseigne lumineuse verticale figurant La Fée illuminera longtemps la rue d'Estrées.
Notice biographique Joël DAVID – Service ResCom – Ville de Rennes – Rennes Métropole