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Mutineries
Après trois années de guerre meurtrière et indécise, dans des conditions de vie effroyables, la lassitude et la colère gagnent les combattants français et l’on sait que se produisirent des mutineries fin mai, début juin 1917. Elles consistèrent en de multiples manifestations de contestation isolées les unes des autres, qui n'obéissaient donc pas à un plan d'ensemble. Les soldats français en arrivent à refuser un certain type de guerre : un assaut dont on sait à l'avance qu'il ne mènera à aucune possession supplémentaire, une guerre inutilement sanglante. À cette revendication, s’ajoute la volonté de voir s'améliorer les conditions d’hygiène et de bénéficier de permissions plus nombreuses. Le 1er mai, le général Pétain est nommé chef d’état-major général et, le 16, le journal annonce que Pétain remplace l'obstiné Nivelle comme général en chef des armées. C’est enfin reconnaître l’échec de la démesurément sanglante offensive française au Chemin-des-Dames. Au lendemain de « la malheureuse affaire du Chemin des Dames » (sic), [1] le gouvernement dépose un projet de loi frappant de sanctions pénales très rigoureuses toutes les fautes commises par les généraux dans l’exercice de leur commandement en temps de guerre. Celui-ci est jugé inopportun par l’éditorialiste de l’Ouest-Éclair qui penche pour la répression des fautes des ministres, fonctionnaires et agents civils.
Pétain comprend les raisons de ces mutineries et concilie une nécessaire fermeté (exécutions de condamnés à mort) et une judicieuse compréhension. Il améliore les conditions et la régularité des permissions et finit par faire gracier, par un décret de juin, la grande majorité des condamnés à mort à laquelle échappe ainsi 500 soldats, 1381 mutins ayant été aussi condamnés aux travaux forcés ou à de longues peines de prison. Ces chiffres varient selon les estimations.
Mais qu’auront appris les rennais de ces mutineries - auxquelles des éléments du 41 RI ont pris part - en lisant leur journal ? Rien, à part quelques vagues allusions en novembre, lorsque le ministre de l’Intérieur, Malvy, est accusé d'avoir fourni des renseignements à l'Allemagne sur le projet d'attaque du Chemin-des-Dames, et d'avoir favorisé les mutineries militaires de juin 1917. Mais les Rennais seront, en revanche, largement informés des mutineries qui se produisent dans les armées allemandes.
Les journaux ne feront pas davantage état des disputes et rixes survenant en gare de Rennes, entre poilus permissionnaires surexcités, en partance pour leurs unités, et les « cognes », les gendarmes, avec bris de carreaux dans des wagons de 1re classe que certains occupent. Les soldats, au moral bien bas en repartant pour le front, en viennent à crier « Vive les Boches ! » Julien Chopin, le Poilu artilleur de Boistrudan, en informera sa famille, sans que sa lettre soit censurée mais ce sont là des faits que la presse ne divulgue pas.