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Manoir de Bourgchevreuil
Manoir De Bourgchevreuil
Ce manoir, situé en plein cœur de la ville et planté au milieu d’un jardin public, attire le regard du passant de la place du Marché et du Manoir de la Chalotais. Et pourtant il présente son dos. La façade se dresse au sud face à l’entrée du Centre culturel implanté au milieu de son parc. La tour ronde qui flanque son côté nord lui donne l’allure d’un petit château. Il a servi de modèle aux peintres amateurs.
Pocquet du Haut-Jussé, dans son ouvrage « Visites et excursions à Rennes et aux alentours », édité en 1974, n’hésite pas à le qualifier de maison de campagne pour les bourgeois aisés du 18e siècle. Et certes en le regardant avec attention il date de cette époque si ce n’était la tour ronde qui est probablement plus ancienne. Mais en entrant par la façade sud visible du Centre culturel, il suffit dans le couloir de se tourner vers la gauche pour admirer la remarquable porte en plein cintre (on dit aussi en anse de panier) et ainsi de se trouver probablement devant la façade du manoir au 17e siècle. Dans cette hypothèse, la pièce à l’angle ouest qui donne sur 3 côtés, où se tiennent les expositions et les cours de musique, a été ajoutée au 18e siècle, comme la façade sud qui est ornée d’un fronton triangulaire percé d’un œil-de-bœuf. La métairie adjacente est mentionnée sur le cadastre de 1820. Une aile arrière a été construite en retour d´équerre postérieurement à cette date.
Mais en fait sa construction remonte au 16e siècle, puisque le premier propriétaire connu est Jacques Bonnier, seigneur des Grées, conseiller au Parlement de Bretagne, qui l’acquiert en 1620. La cheminée visible au rez-de-chaussée dans l’ancienne cuisine porte la date plus ancienne de 1602. On sait à présent par les descendants des fermiers que cette cheminée a été apportée de la métairie accolée au manoir, où se trouve à présent le Centre de loisirs. Il aurait été édifié à l’emplacement d’un relais de chasse. Des vestiges du 16e siècle sont encore visibles dont une porte intérieure en anse de panier, des poutres moulurées et une baie sur la façade extérieure. Des travaux de rénovation ont eu lieu au 17e siècle. La tour d'escalier greffée sur l'édifice est sans doute contemporaine de ces travaux. Par un acte du 12 Juin 1625, Jacques Bonnier vend à Jean de Gennes du Boisguy, protestant réformé, « la noble terre » qui se composait du manoir, de la métairie, du jardin, du pourpris, des bois, des rabines et des vergers. A cette époque, Bourgchevreuil relevait féodalement du marquisat de Cucé et était exempt de fouage (impôt extraordinaire perçu sur chaque feu ou foyer, c'est-à-dire par unité familiale et/ou d'habitation). Le nouvel acquéreur réalise plusieurs acquisitions foncières en 1626, 1633, 1635 et 1637 pour agrandir le domaine. A sa mort, suite à des revers de fortune de son fils, le Manoir devint la propriété de ses deux filles, Catherine et Marie qui épousèrent les frères Jacques de Farcy de la Villedubois, et René de Farcy de la Daguerie. Le petit-fils de Catherine épousa sa cousine, la petite fille de Marie. Le domaine resta ainsi dans cette famille jusqu’au 27 Janvier 1715 où il fut vendu à Jacques Robinois, marchand de vin, demeurant à Rennes, rue Saint-Georges dans la maison de la « Teste noire ». C’est à lui que l’on doit la transformation du logis actuel par l’adjonction d’une grande pièce située à l’ouest, s’ouvrant sur trois côtés, et séparée de l’ancienne façade par le couloir qui mène à l’escalier. Pour des raisons que nous ignorons, il transmit le domaine à sa sœur, Julie-Perrine Robinois, qui mourut à l’âge de 20 ans le 30 Juin 1734, un an après son mariage en 1733 avec Julien-Anne-Marie Loryot, procureur au Présidial de Rennes. Leur fils, Julien Benoist, hérita du domaine à la mort de son père. Parmi leur nombreuse descendance, deux des frères Loryot cédèrent Bourgchevreuil à Amaury, Marie, Alexandre Dréo, maître-orfèvre à Rennes depuis 1784, et son épouse Rose Gérard, par contrat du 24 Thermidor an IV (11 Août 1796). C’est à lui que l'on doit la façade sud et les lambris, les cheminées et le départ de l'escalier qu’il modifia à la fin du 18e siècle ou au début du 19e siècle. Leurs initiales entrelacées sont apposées au sommet de la grille d'entrée. Des rénovations ont pu être effectuées dans la première moitié du 18e siècle, à moins que la grille soit un remploi de 1731, date portée en partie haute. C’est à Gilbert Guillou, maître ferronnier et sculpteur aux services techniques de la ville que l’on doit la restauration récente de cette grille.
Amaury Dréo fut maire de Cesson du 4 juillet 1823 au 12 Mai 1826 (voir les maires de Cesson-Sévigné de 1790 à 2011 par Paulette Demay, dépôt légal Mai 2011).
Des aménagements intérieurs ont également été effectués à cette période.
La terre de Bourgchevreuil resta la propriété de sa fille Marie-Thérèse jusqu’à la mort de celle-ci intervenu le 17 Février 1889 au 5 de la rue Pont aux Foulons à Rennes, à l’âge de cent ans.
Ses neveux cédèrent la propriété au Docteur Raymond Aubrée le 16 Mai 1889, frère du propriétaire de la Chalotais.
Sa petite fille, Mademoiselle de Graux de Graix, y vécut seule de nombreuses années, avant de la vendre à la Ville en 1990. La municipalité y entreprit en 1991 des travaux de restauration, d’aménagement du jardin à la française. Une fenêtre factice permet d’équilibrer le pignon ouest.
Le parc est inscrit comme site classé par le ministère de l´environnement depuis 1992.
A l’intérieur, des peintures ont été restaurées par Philippe Pengresh, professeur à l’École d’Arts Plastiques. Ces peintures datent de fin 18e, début 19e siècle.
Une peinture, imitée de l’époque baroque, se trouve au rez-de-chaussée du Manoir dans la grande salle au-dessus de la porte qui donne sur le couloir. Elle représente Aurore, sœur d’Hélios, le soleil, et de Séléné, la lune, mariée à Mars et issue de la première génération des Titans. Homère l’a décrite comme la déesse « aux doigts de rose », car la rosée qu’elle répand serait née des larmes versées à la mort de son fils Memnon, tué par Achille devant Troie. Elle est représentée ici conduisant le char d’Apollon au matin, ouvrant la route au soleil, versant la rosée et se protégeant les yeux de la lueur éclatante de l’astre divin qui se lève sur la terre. Elle est souvent traitée comme une allégorie du matin. Son iconographie se maintient au 19e siècle, en peinture et en sculpture[1].
Ces deux peintures ornent les boiseries de la salle à l’est, contiguë au centre aéré.
La scène de genre est narrative. Elle raconte un épisode de la condition paysanne où l’on voit la femme à genoux devant la vaisselle répandue par terre et montrant du doigt son mari de dos qui porte des seaux d’eau suggérant une scène de ménage. La nature morte à droite est célèbre à cause du homard ou de l’écrevisse et du petit écureuil, avec une corbeille de fruits figurant l’abondance, la générosité de la nature. L’escalier qui monte à l’étage s’enroule autour d’un pilier en bois agrémenté d’une rampe sculptée d’un seul tenant dans la masse de ce bois. C’est une particularité très rare qui mérite d’être soulignée.
Références
- ↑ Source : les Métamorphoses d’Ovide VII, 690-752. Texte tiré de « Héros et Dieux de l’Antiquité, éditions Flammarion.