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Déraillement au Haut-Sévigné

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Le samedi 10 juillet 1943, à 1 h 36, des soldats allemands rentrent de permission dans un train F.F. 505 en provenance de Paris, comme chaque nuit dans la noria des va-et-vient de permissionnaires. Somnolents ou endormis, ils sont brusquement choqués dans un bruit de ferrailles. 8 soldats allemands furent tués, 30 gravement blessés et 50 plus légèrement, indique le rapport de la 7e armée allemande. 60 ambulances furent nécessaires. L'Humanité avait rapporté à l'époque qu'un train de vacances entre Rennes et Noyal-Acigne avait déraillé et, comme prévu, avait été percuté par un train de transport de marchandises venant en sens inverse. Résultat : deux trains détruits, 200 morts et 300 blessés !

Lieu du déraillement du 10 juillet 1943

En fait, entre 2 h 20 et 3 h du matin, leur train vient de dérailler et, en outre, a été heurté par un train de marchandisee en provenance de Rennes. [1]

Cette catastrophe est le fait de Louis Pétri, 24 ans, de Louvigné-du-Désert, alors abrité chez Mme Nobilet, 9 rue Jules Simon à Rennes, dont le mari avait été fusillé le 30 décembre 1942[2]. Ce FTP qui commettra une douzaine d'attentats sur l'année, alias Loulou, Roland, Hubert, Tanguy[3] et six camarades ont, pendant une demi-heure, à 1,6 km de la gare de Noyal-Acigné, déboulonné des rails à l'aide d'instruments fabriqués par eux, des tubes emboîtés l'un dans l'autre, terminés par une barre percée de deux trous pour dévisser les boulons. Des ficelles tenues par des guetteurs constituaient le système d'alerte.

Le 8 juillet, des camarades de la gare, dont Victor Pannetier, [4] avaient indiqué qu'un train de permissionnaires passait la nuit à 1 h 36, près du passage à niveau du Haut-Sévigné, en Cesson-Sévigné.

Ce 10 juillet, les FTP Delattre, Meriot et Chollet entendirent le train qui venait de Paris, et, coïncidence heureuse, un train de troupe vint de Rennes. Ce fut un double déraillement réussi. La locomotive et des wagons furent détruits et le trafic arrêté pour deux jours. Les employés n'avaient jamais vu un tel tas de ferraille. Revenus à 11 heures du matin sur le terrain, ils virent les patrouilles affolées qui montaient et descendaient le long des talus. Des ambulances sillonnaient les routes.[5] [6]

Avis annonçant les représailles pour une "tentative" de sabotage (Ouest-Eclair 12.07.1943)

Des paysans de la région furent arrêtés puis relâchés. Victor Pannetier, communiste qui habitait à Noyal sur Vilaine fut arrêté, bien qu'il n'eût pas participé directement. La Ville de Rennes fut frappée d'une amende de deux millions. C'est alors que le préfet régional Ripert établit une liste de communistes suspects qui, par la suite, furent emprisonnés et déportés comme otages. Mais Delattre, Meriot et Chollet, leur chef d’accusation restreint par le juge Garnot aux faits d’appartenance à des groupements paracommunistes, ne seront condamnés qu’aux travaux forcés à temps, ayant échappé à la juridiction allemande. Ils seront emprisonnés à Vitré... dont le commandant Pétri les fera évader.* (voir note) Il fut décidé que les interdits de séjour seraient arrêtés et retenus comme otages. Des personnes figurant sur les listes de la Sûreté furent donc appréhendées, y compris un électricien, M. Louis Desnos qui n'était pas interdit de séjour et qui ne fut pas libéré et fut interné dans divers camps, le commissaire Piat l'ayant maintenu au motif que ce détenu était communiste. [7]

Et l'occupant punit : l'Ouest-Éclair du 12 juillet publie un avis à la population émanant du "Kommandeur de la police de Sûreté et du SD de Rennes" et frappant l'arrondissement d'une amende de deux millions de francs à verser par chèque au profit de l’État allemand pour le 15 juillet et annonçant la fermeture des cinémas de l'arrondissement du 12 au 14 juillet inclus.

Le juge Marc-Jean Garnot sera blanchi à la Libération par la Cour de justice [8] [9].

  • Note : C'est après l'affaire de Vitré que Pétri, malade et fiévreux, fut hébergé une nuit à Rennes dans la chambre du jeune inspecteur Jean Flouriot qui l'accompagna le lendemain en tramway pour se rendre à la gare. De la musette de Pétri somnolent sur la banquette s'échappa... une grenade qui roula dans le couloir central vers un groupe de soldats allemands debout au bout de la voiture. Fourniot raconte qu'il sortit de sa poche un paquet de cigarettes qu'il fit aussi tomber près de la grenade et ramassa prestement les deux objets, sous les yeux de la dame enregistreuse et dit : "Faut même ramasser ses cigarettes !"[10]

références

  1. ADIV 43 W 53 10 juillet 1942
  2. Butte des Fusillés de la Maltière
  3. rue Louis Pétri
  4. Victor Pannetier, un résistant
  5. rapport d'activités du commandant Louis Pétri, commandant régional F.F.T.P., 51 boulevard de Sévigné, Rennes
  6. Confidences de Louis Petri recueillies par J.C. Pichon
  7. Cour de Justice d'Ille-et-Vilaine. (Ouest-France 12.12.1945)
  8. La grande histoire des Français sous l'occupation. 9 Les règlements de compte, septembre 1944 – janvier 1945, par Henri Amouroux - Robert Laffont -1991
  9. Epuration
  10. Conférence les Heures sombres à Rennes par Kristian Hamon et Jean Flouriot. Archives municipales, 24 mai 2012