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Tickets, même pour les semences...
On connaît en général que, pendant la guerre de 1939-1945, il fallait avoir des tickets pour pouvoir acheter la plupart des denrées, tickets attribués selon l'âge ( exemple J1, J2, J3 pour les tranches d'âge des jeunes...) et cette pratique dura au-delà de la guerre.
Les Rennais n’ont pas échappé aux problèmes de rationnement, de pénurie des denrées alimentaires et de produits tels que les vêtements et les chaussures, l’électricité et même l’eau en 1944. Dans le journal détaillé d’une Rennaise, Mme V. Ladam, on relève des données qui traduisent bien ces soucis : 12 observations ou relations de mesures pour 1940, 15 pour 1941, 16 en 1942 , seulement 7 en 1943, en raison probablement des relations concernant les bombardements, et 13 de janvier à août 1944. Les Rennais se sont habitués à découper des petits carrés des tickets et à faire la queue pour faire «honorer » ces tickets.
La comparaison des montants de dépenses d’une famille rennaise relativement aisée et à composition constante de cinq personnes (deux adultes, trois enfants), sur la moyenne des mois de février et mars, donne une dépense de lait de 1941 à 1943 en hausse de 80%. De 1940 à 1943, la dépense de pain n’augmente que de 2%, mais celle de boucherie est multipliée par 3,22 et la dépense d’œufs par 3,40, sans que l’on puisse définir s’il y a eu achats au « marché noir » ou restriction de certains achats en raison de la cherté.[1]
En Ille-et-Vilaine, les familles doivent en général se contenter, au maximum d’un repas de viande par semaine et encore certaines en sont totalement privées. Le mécontentement de la population s’aggrave de jour en jour à Rennes. Même la galette de blé-noir , consommée par les classes pauvres, ne va plus pouvoir être fabriquée par suite du manque de sarrasin. [2] Pour le mois de juillet 1941, les lecteurs du journal lisent attentivement les rations autorisées par denrée sur tickets et selon les catégories de consommateurs : rations hebdomadaire de 250 gr de viande (350 et 450 pour les travailleurs de force Ière et 2nde catégories), 80 gr de fromage, rations mensuelles de 550 gr de matière grasse, de 500 gr de sucre (sauf enfant 1 kg), de 250 gr de pâtes,, de 200 gr de riz(sauf enfant 300), de 125 à 250 gr de chocolat.[3]
Ce que l'on sait moins, c'est que, même pour l'attribution de semences à acheter, il fallait avoir un lopin de terre et justifier le nombre de personnes au foyer ou vivant du jardin. Des Rennais ayant la chance d'avoir un jardin pouvaient ainsi disposer, en ces temps de disette d'un appoint de nourriture peu coûteux. Tel était le cas de ce Rennais de 76 ans, habitant boulevard de la Liberté un appartement au 5e étage, qui était propriétaire d'un jardin, à Thorigné sur Vilaine, à " La Marcra " comme on disait pour " La Marquerais". Sur cette carte, délivrée le 21 février 1943, il avait fait enregistrer huit cartes d'alimentation : celles de son épouse et la sienne, celle d'une de ses filles (qui sera tuée au bombardement du 9 juin 1944[4] et celles de la famille de son fils.
Au verso de la carte étaient prodigués des conseils sur l'utilisation des semences de 22 légumes : ainsi en semant en place 5 gr de betteraves à salade sur 10 mètres carrés, on récolterait 20 kg, 10 gr de mâche, on en obtiendrait 5 kg... et l'on conseillait de ne pas dépasser les quantités nécessaires.
Le vieux monsieur, lui qui se désignait comme ayant été le deuxième à Rennes à avoir possédé une automobile, allait à Thorigné, poussant une brouette, qu'il ramenait sur neuf kilomètres, chargée des précieux légumes... Les jours précédant la libération de Rennes, il allait chercher l'eau et le lait sous les obus tombant sur la ville.[5]
références
- ↑ livre de comptes de Mme E. Maignen, à Rennes
- ↑ synthèse des préfets rapports du 15 au 25 avril 1941
- ↑ Ouest-Eclair du 25 juin
- ↑ bombardements des 9 et 12 juin 1944
- ↑ Notes d'un vieux rennais pendant les jours précédant la libération de Rennes