« Chronique vezinoise sous l'occupation n°02 » : différence entre les versions

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Il faut veiller aux soins des chevaux, les entretenir soigneusement, les chausser d’où l’activité importante qui se déroule dans ma maréchalerie. Il faut aussi réparer les machines agricoles, fabriquer, forger certaines pièces indispensables, inexistantes sur le marché. Les pièces détachées sont difficiles à trouver sinon impossibles. J’adore me rendre dans la forge. Les ''Letort'' en sont les propriétaires. Le père ''Pierre'', le fils ''Pierrot'' et plusieurs employés s’y activent. Le père ''Letort'' est manchot, il est appareillé comme le Capitaine Crochet. Cela ne l’empêche pas de battre le fer comme les autres. Le fils, ''Pierrot'', c’est un peu mon idole, c’est lui qui porte la Bannière les jours de procession. A cette époque, il aura entre dix sept et vingt ans
Il faut veiller aux soins des chevaux, les entretenir soigneusement, les chausser d’où l’activité importante qui se déroule dans ma maréchalerie. Il faut aussi réparer les machines agricoles, fabriquer, forger certaines pièces indispensables, inexistantes sur le marché. Les pièces détachées sont difficiles à trouver sinon impossibles. J’adore me rendre dans la forge. Les ''Letort'' en sont les propriétaires. Le père ''Pierre'', le fils ''Pierrot'' et plusieurs employés s’y activent. Le père ''Letort'' est manchot, il est appareillé comme le Capitaine Crochet. Cela ne l’empêche pas de battre le fer comme les autres. Le fils, ''Pierrot'', c’est un peu mon idole, c’est lui qui porte la Bannière les jours de procession. A cette époque, il aura entre dix sept et vingt ans


J’aime sentir toutes le odeurs produites par la forge : la corne du sabot d’un cheval qui grille au moment de l’ajustement du fer, l'odeur que dégage le fer brûlé que le bras martèle sur l’enclume, celle de la graisse des machines agricoles en attente de réparation. L'entrée de la forge est libre pour moi, je ne me prive pas de regarder, d’observer, je regarde attentivement les opérations successives de fabrication d'un superbe fer à cheval à partir d'une simple barre de fer. La réalisation d’une pièce de charrue. Combien de coups de marteau faut-il donner pour effectuer cette transformation ? Le fer retourne souvent au feu dans le charbon incandescent qu'il est constamment nécessaire  d'activer. Quand on me le permet, je ne laisse à personne ma place pour tirer la chaîne du grand soufflet dont l'activation de l'air redonne une belle couleur rouge orange au charbon. Le forgeron n'ignore pas le plaisir et la fierté que j’ai en l’actionnant. Je pense qu'il prend plaisir à me faire plaisir. A proximité de chaque enclume, se trouve un fût rempli d'eau dans lequel le forgeron trempe le fer qu'il travaille pour le refroidir, un bouillonnement se fait entendre, la vapeur jaillit, elle ajoute à l'odeur particulière de la forge, cette odeur que j'aime tant. Contre les murs sont disposés quantité d'outils, souvent fabriqués pour des opérations particulières, spécifiques. Je remarque surtout les pinces, peut-être parce qu’elles sont les plus nombreuses. C'est une grande maréchalerie, constamment en activité, les chocs des marteaux sur les enclumes sont comme une musique et donnent un air de fête, de gaîté au village. Les dimanches sont tristes, la forge est muette, ses portes sont pourtant grandes ouvertes, il ne m’est pas interdit d'y entrer. La maréchalerie fait aussi débit de boissons, c’est madame ''Letort'' et la bonne qui font fonctionner le commerce. L'ensemble des bâtiments se compose d'une grande maison de construction moderne pour l’époque, avec étage, construite en schiste rouge. Aujourd’hui c’est une pharmacie. Les impostes des fenêtres du rez-de-chaussée sont ornées de briques rouges ainsi que les fenêtres simples de l’étage. L'étage est réservé aux appartements privés. La salle du café, la cuisine, occupent entièrement le rez-de-chaussée. On y sert du cidre à la bolée et au litre. Les fûts sont à la cave, on tire le cidre à partir du comptoir. Pour les boissons des enfants ou des dames, on propose des sodas. Je les appelle les sodas verts, jaunes et rouges, je ne connais pas ou ne retiens pas les dénominations exactes, Menthe, Citron ou Grenadine. Les bouteilles sont en verre blanc épais, on distingue bien la couleur du produit contenu. Elles sont toutes jolies. Le choix est souvent difficile et les occasions rares, surtout entre la rouge et la verte, la jaune est trop fade à mon goût. Pour pouvoir verser le liquide dans le verre, il faut appuyer sur une bille bloquée par la pression dans le goulot. Je laisse cette opération à un plus costaud que moi ou à un adulte, la chose est trop difficile, je n’en ai pas la force. A l’ouverture, quand la bille est enfin dégagée, j’adore entendre le bruit du gaz qui s'échappe brusquement, pschitt !!… et les bulles qui se forment. C'était un luxe pour un enfant appartenant à une infortunée famille.
J’aime sentir toutes le odeurs produites par la forge : la corne du sabot d’un cheval qui grille au moment de l’ajustement du fer, l'odeur que dégage le fer brûlé que le bras martèle sur l’enclume, celle de la graisse des machines agricoles en attente de réparation. L'entrée de la forge est libre pour moi, je ne me prive pas de regarder, d’observer, je regarde attentivement les opérations successives de fabrication d'un superbe fer à cheval à partir d'une simple barre de fer. La réalisation d’une pièce de charrue. Combien de coups de marteau faut-il donner pour effectuer cette transformation ? Le fer retourne souvent au feu dans le charbon incandescent qu'il est constamment nécessaire  d'activer. Quand on me le permet, je ne laisse à personne ma place pour tirer la chaîne du grand soufflet dont l'activation de l'air redonne une belle couleur rouge orange au charbon. Le forgeron n'ignore pas le plaisir et la fierté que j’ai en l’actionnant. Je pense qu'il prend plaisir à me faire plaisir. A proximité de chaque enclume, se trouve un fût rempli d'eau dans lequel le forgeron trempe le fer qu'il travaille pour le refroidir, un bouillonnement se fait entendre, la vapeur jaillit, elle ajoute à l'odeur particulière de la forge, cette odeur que j'aime tant. Contre les murs sont disposés quantité d'outils, souvent fabriqués pour des opérations particulières, spécifiques. Je remarque surtout les pinces, peut-être parce qu’elles sont les plus nombreuses. C'est une grande maréchalerie, constamment en activité, les chocs des marteaux sur les enclumes sont comme une musique et donnent un air de fête, de gaîté au village. Les dimanches sont tristes, la forge est muette, ses portes sont pourtant grandes ouvertes, il ne m’est pas interdit d'y entrer. La maréchalerie fait aussi débit de boissons, c’est madame ''Letort'' et la bonne qui font fonctionner le commerce.  
 
L'ensemble des bâtiments se compose d'une grande maison de construction moderne pour l’époque, avec étage, construite en schiste rouge. Aujourd’hui c’est une pharmacie. Les impostes des fenêtres du rez-de-chaussée sont ornées de briques rouges ainsi que les fenêtres simples de l’étage. L'étage est réservé aux appartements privés. La salle du café, la cuisine, occupent entièrement le rez-de-chaussée. On y sert du cidre à la bolée et au litre. Les fûts sont à la cave, on tire le cidre à partir du comptoir. Pour les boissons des enfants ou des dames, on propose des sodas. Je les appelle les sodas verts, jaunes et rouges, je ne connais pas ou ne retiens pas les dénominations exactes, Menthe, Citron ou Grenadine. Les bouteilles sont en verre blanc épais, on distingue bien la couleur du produit contenu. Elles sont toutes jolies. Le choix est souvent difficile et les occasions rares, surtout entre la rouge et la verte, la jaune est trop fade à mon goût. Pour pouvoir verser le liquide dans le verre, il faut appuyer sur une bille bloquée par la pression dans le goulot. Je laisse cette opération à un plus costaud que moi ou à un adulte, la chose est trop difficile, je n’en ai pas la force. A l’ouverture, quand la bille est enfin dégagée, j’adore entendre le bruit du gaz qui s'échappe brusquement, pschitt !!… et les bulles qui se forment. C'était un luxe pour un enfant appartenant à une infortunée famille.




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