Rue Bigot de Préameneu
La rue Bigot de Préameneu est une voie axée nord-sud joignant la rue de Riaval au boulevard Emile Combes après avoir coupé le boulevard Jacques Cartier et laissé sur la gauche l'église Sainte-Thérèse. Elle fut dénommée par délibération du conseil municipal de la Ville de Rennes le 31 décembre 1928, en remplacement du chemin de la Godmondière.
« Chemin de la Godmondière, partant de la rue de Riaval et se dirigeant vers le Haut-Quineleu : Rue Bigot de Préameneu, jurisconsulte (1747-1825). »
— L'Ouest-Eclair
Origine : Numéro du 6 janvier 1929 • Recueilli par Manu35 • 2018 • licence
Félix-Julien-Jean Bigot de Préameneu
Jurisconsulte et magistrat
(26 mars 1747, Rennes - 31 juillet 1825, Paris)
Félix était le fils d’un avocat au Parlement de Bretagne. Destiné à la carrière ecclésiastique, il commença ses études au séminaire de Rennes avant d’entreprendre, à la mort de son père en 1762, une carrière juridique. Avocat au Parlement de Rennes en 1767, docteur en droit en 1768, il acheta une charge de conseiller (1778). À la même époque, il " monta " à Paris, avec les fonctions d’agent général des États de Bretagne. Il représentait dans la capitale les intérêts des principales communes de sa province et de ses protecteurs Rohan.
Un révolutionnaire modéré
On le trouve juge au Tribunal de district du 4e arrondissement de Paris, puis commissaire du roi dans le Gard où des troubles étaient survenus. En septembre 1791 il est élu à l'Assemblée législative député de la Seine et prend place parmi les Modérés. Le 7 janvier 1792, il prononce à l'Assemblée un discours affirmant "le droit légitime du roi à représenter le pays"[1]. Il vote contre la suppression de la sanction royale, la poursuite des prêtres insermentés et les mesures à l'encontre des émigrés. Il fit voter l'interdiction aux hommes armés de présenter des pétitions et, le 10 août 1792, il prit la défense de la famille royale. Il est donc devenu suspect et c'est le comité de surveillance de Rennes qui décide, le 18 novembre 1793 de faire arrêter "Préameneu-Bigot", mais il ne l'est que le 4 juin 1794 à Rennes et ses papiers, qui ne contenaient rien de suspect, sont entassés dans une malle scellée confiée à ... son beau-frère en attendant son expédition au comité de sûreté générale car c'est à Paris où il est incarcéré qu'on pouvait trouver et prouver ses agissements suspects[2]. Sauvé par la chute de Robespierre, il entre à l'Académie Française en 1800.
Une grande carrière au service de Napoléon Ier
En mars 1797, Bigot de Préameneu est président de la 4e chambre au Tribunal de district de Paris et participe aux préparatifs du coup d'état de Brumaire. Membre de la commission d'élaboration du code civil, conseiller d'état à la section de législation, il va en 1805 en Ligurie, république annexée, pour y organiser la justice ! Il est ministre des cultes en France de janvier 1806 à avril 1814. Le régime l'honore : il est membre de l'Institut, membre de l'Académie française, grand officier de la Légion d'honneur en 1804, président du collège électoral d'Ille-et-Vilaine en 1806, comte d'Empire en 1808. Il accompagne Marie-Louise à Blois en avril 1814. La Restauration le démet évidemment de tous ses mandats. Pendant les Cent-Jours, il est fait pair de France. Après Waterloo, il se retire à Paris où il exerce quelques mandats secondaires. Il s'efface alors et rentre à Rennes où il organise les écoles primaires.
Une missive caustique
« EN PASSANT.
Nous avons reçu la lettre suivante :
« Monsieur le Piéton de Service,
« Depuis trois ans, l'ex-chemin de la Godemondière, aujourd'hui rue Bigot-de-Préameneu, est à l'ordre du jour.
« Nous avons vu son aménagement agité de nombreuses fois aux séances du Conseil Municipal.
« Nous avons vu des affiches de Commodo et Incommodo (enquête préalable que va réaliser l'administration avant de faire des déclarations d'utilité publique, ndlr). Une déclaration d'utilité publique a été votée il y a plusieurs mois. Mais c'est tout.
« La seule réalisation que nous avons constatée c'est l'apposition d'une belle plaque indicatrice qui porte, flambant neuf, le nom de M. Bigot de Préameneu.
« Eh bien, si ce brave homme, qui doit avoir droit à notre admiration, revenait sur cette terre, il ne manquerait certainement pas de tirer les oreilles à ceux qui ont abusé de son nom en osant dénommer un pareil bourbier du nom de rue et en lui accordant le parrainage.
« Comme réalisation. MM. les Conseillers, vous conviendrez que ça ne vous a pas coûté bien cher !
« Mais nous, c'est la typhoïde qui nous guette, peut-être la peste ou le choléra. il vous est peut-être permis d'ignorer que plus de cinquante ménages et au moins autant d'accès, qu'ils sont obligés d'y circuler souvent la nuit, non pas pour aller au Théâtre, on n'y admet pas les boueux, comme on nous dénomme, mais pour se rendre à leur travail.
« Quant aux enfants, on se demande comment aucun accident grave n'a encore été à déplorer.
« C'est bien dommage que cinq ans nous séparent des élections. Nous aurions tenté de trouver un candidat dans nos rues et peut-être aurions-nous eu des chances de voir les actes suivre les promesses.
« Je crois qu'il ne nous reste que la résignation comme partie. Dans cinq ans nous nous en souviendrons.
« En attendant, nous aurons l'avantage de réunir toutes les feuilles d'imposition, de vous les adresser, M. le Maire, car nous estimons que M. le Receveur Municipal doit nous ignorer autant que vous, et que la comédie n'a que trop duré.
« S'il vous faut trois ans pour solutionner une si minime question, je doute fort que le règne actuel soit marqué d'une pierre blanche par ses grandes réalisations.
« Un habitant. »
Nous transmettons à Qui de Droit, en espérant que les services intéressés feront quelque chose pour les habitants de la rue Bigot-de-Préameneu.
Le Piéton de Service. »
— L'Ouest-Eclair
Origine : Numéro du 6 mai 1930 • Recueilli par Manu35 • 2018 • licence