« Herbert Raymond Bachant, libérateur » : différence entre les versions
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[[Fichier:Mother_and_3_children.jpg|right|thumb|La maman et les triplées devant la photo de Herbert R. Bachant qui allait être tué devant Rennes, à Maison-Blanche]] | [[Fichier:Mother_and_3_children.jpg|right|thumb|La maman et les triplées devant la photo de Herbert R. Bachant qui allait être tué devant Rennes, à Maison-Blanche]] | ||
===Une triple naissance médiatisée=== | |||
Un journal du New Jersey annonça, en février 2013, le décès de Muriel Bachant, 90 ans. Elle avait tout juste 22 ans et était maman de triplées de quatre mois quand son mari, Herbert Bachant de la 4e division blindée américaine (4th Armored Division) pendant la Seconde Guerre mondiale fut porté disparu au combat en France, deux mois après le jour J. | Un journal du New Jersey annonça, en février 2013, le décès de Muriel Bachant, 90 ans. Elle avait tout juste 22 ans et était maman de triplées de quatre mois quand son mari, Herbert Bachant de la 4e division blindée américaine (4th Armored Division) pendant la Seconde Guerre mondiale fut porté disparu au combat en France, deux mois après le jour J. | ||
[[Fichier:0220A_tripletsWdadRST65p.jpg|250px|right|thumb| Herbert R. Bachant devant la photo de ses filles]] | [[Fichier:0220A_tripletsWdadRST65p.jpg|250px|right|thumb| Herbert R. Bachant devant la photo de ses filles]] | ||
« J’espère que les Américains le reprendront aux Allemands lors de notre avance, et j’espère qu’ils le rapatrieront » avait-elle déclaré aux reporters dans son appartement du Bronx en août 1944. « Je ne veux pas qu’on soit tristes pour moi. Je ne suis pas différente de toutes les épouses dont le mari est là-bas à risquer sa vie. » | « J’espère que les Américains le reprendront aux Allemands lors de notre avance, et j’espère qu’ils le rapatrieront » avait-elle déclaré aux reporters dans son appartement du Bronx en août 1944. « Je ne veux pas qu’on soit tristes pour moi. Je ne suis pas différente de toutes les épouses dont le mari est là-bas à risquer sa vie. » | ||
Muriel avait 15 ans lorsqu’elle rencontra Herbert, fougueux garçon roux, de 1,70 mètres, 65 kilos, à la moustache bien taillée. Il approchait de 30 ans et était conducteur de bus. Ils se marièrent lorsqu'elle avait 19 ans, quelques semaines avant le bombardement japonais de Pearl Harbor et Herbert fut rappelé à l’armée après l’attaque. | Muriel avait 15 ans lorsqu’elle rencontra Herbert, fougueux garçon roux, de 1,70 mètres, 65 kilos, à la moustache bien taillée. Il approchait de 30 ans et était conducteur de bus. Ils se marièrent lorsqu'elle avait 19 ans, quelques semaines avant le bombardement japonais de Pearl Harbor et Herbert fut rappelé à l’armée après l’attaque. | ||
Les triplées avaient été conçues en juillet 1943 lors de la visite de Muriel à son mari à sa base d’entraînement au Texas. Herbert fut envoyé par bateau en Angleterre en janvier 1944; les filles naquirent dans un hôpital de New York le 30 mars 1944. Leur arrivée fit sensation à une époque antérieure aux traitements de fertilité qui banalisèrent les naissances multiples | |||
Pour complaire aux photographes des média, elle plaça les petites Janet Lee, Nancy Sue et Karen Ann ensemble sur un confortable fauteuil rembourré. | |||
Une photographie de l’Associated Press du 27 avril 1944 présente un Herbert Bachant radieux montrant à des copains, lors de manœuvres de pré-invasion en Angleterre, une photo de sa femme et des nouveau-nées. Ceux-ci organisèrent entre eux un défilé militaire pour fêter "l'heureux papa". | |||
===Un papa tué devant Rennes=== | |||
[[Fichier:Telegramme.jpg|250px|right|thumb| | [[Fichier:Telegramme.jpg|250px|right|thumb| | ||
"Le secrétaire d'état à la guerre me demande de vous assurer de sa profonde sympathie dans la perte de votre mari, le première classe Herbert R Bachant d'abord porté manquant en opération, rapport ayant été maintenant reçu ici de sa mort au combat le Ier août en France. Lettre suit"]] | "Le secrétaire d'état à la guerre me demande de vous assurer de sa profonde sympathie dans la perte de votre mari, le première classe Herbert R Bachant d'abord porté manquant en opération, rapport ayant été maintenant reçu ici de sa mort au combat le Ier août en France. Lettre suit"]] | ||
[[Fichier:Maison_blanche_autochenille_Bachant.jpeg|250px| | [[Fichier:Maison_blanche_autochenille_Bachant.jpeg|250px|left|thumb|Schéma fait de mémoire, fin 1944, par un 2nd Lieutenant : l'autochenille de Bachant est située en bordure de route, indiquée par la flèche marquée ''I0th Inf Bn'']] | ||
[[Fichier:Autochenille_maison_blanche024.jpg|250px|left|thumb| En bordure de la route, la carcasse | [[Fichier:Autochenille_maison_blanche024.jpg|250px|left|thumb| En bordure de la route, la carcasse d'une des 3 autochenilles , renversée, l'avant écrasé, probablement celle du 704th Tank Destroyer]] | ||
Il n’y eut pas de fin heureuse. Herbert Raymond Bachant, matricule 32090456, ne devait jamais embrasser ses trois filles. L'une d'elles étant gravement malade, la maman avait pourtant envoyé une lettre au général Wood, sollicitant une permission pour son mari, mais celle-ci était parvenue trop tard, lui écrivit ultérieurement le général. La nouvelle arriva qu’Herbert Bachant avait été tué au voisinage de Rennes, le Ier août 1944 lorsque son autochenille fut atteinte à Maison Blanche.[1] Herbert R. Bachant et les six autres membres d'équipage de l'autochenille (halftrack), B-14 dénommée "Belly Button" (nombril), du I0e bataillon d'infanterie blindé, furent tués par un coup direct d'un canon de 88 mm de la batterie allemande cachée derrière des haies alors que leur véhicule était en bordure de la route Betton-Rennes. Deux autres autochenilles et onze chars Sherman aussi engagés sur cet itinéraire, dont le danger avait été pourtant signalé,[2] furent ainsi détruits en même temps à portée de la batterie allemande toute proche. Il fallut attendre encore deux jours avant de voir la libération de Rennes. | Il n’y eut pas de fin heureuse. Herbert Raymond Bachant, matricule 32090456, ne devait jamais embrasser ses trois filles. L'une d'elles étant gravement malade, la maman avait pourtant envoyé une lettre au général Wood, sollicitant une permission pour son mari, mais celle-ci était parvenue trop tard, lui écrivit ultérieurement le général. La nouvelle arriva qu’Herbert Bachant avait été tué au voisinage de Rennes, le Ier août 1944 lorsque son autochenille fut atteinte à Maison Blanche.[1] Herbert R. Bachant et les six autres membres d'équipage de l'autochenille (halftrack), B-14 dénommée "Belly Button" (nombril), du I0e bataillon d'infanterie blindé, furent tués par un coup direct d'un canon de 88 mm de la batterie allemande cachée derrière des haies alors que leur véhicule était en bordure de la route Betton-Rennes. Deux autres autochenilles et onze chars Sherman aussi engagés sur cet itinéraire, dont le danger avait été pourtant signalé,[2] furent ainsi détruits en même temps à portée de la batterie allemande toute proche. Il fallut attendre encore deux jours avant de voir la libération de Rennes. | ||
Nancy Bachant vit près de Seattle, le Dr Janet Bachant à Manhattan et Karen Sellars en Angleterre. Nancy, qui a recherché l’histoire de la mort de son père, se souvient que sa mère était effondrée mais déterminée à donner une bonne vie à ses filles. Axée sur l’éducation, leur mère, qui comme son mari n'avait suivi que l'enseignement primaire, les fit aller toutes trois, sous le nom de leur beau-père, au collège en Pennsylvanie aux frais de l’Etat. Les triplées apprirent que leur père était mort à la guerre lorsqu’elles eurent environ 4 ans. A 18 ans, elles lui rendirent hommage en reprenant son nom. | Nancy Bachant vit près de Seattle, le Dr Janet Bachant à Manhattan et Karen Sellars en Angleterre. Nancy, qui a recherché l’histoire de la mort de son père, se souvient que sa mère était effondrée mais déterminée à donner une bonne vie à ses filles. Axée sur l’éducation, leur mère, qui comme son mari n'avait suivi que l'enseignement primaire, les fit aller toutes trois, sous le nom de leur beau-père, au collège en Pennsylvanie aux frais de l’Etat. Les triplées apprirent que leur père était mort à la guerre lorsqu’elles eurent environ 4 ans. A 18 ans, elles lui rendirent hommage en reprenant son nom. | ||
=== Les triplées à Rennes en août 2014=== | |||
En 2003 ses trois filles vinrent en France, au mémorial Patton à Avranches, ville à la libération de laquelle leur père avait contribué la veille de sa mort, et au cimetière de Saint-James, où son corps ainsi que ceux de deux de ses camarades disloqués avaient été inhumés ensemble, là où elles pensaient qu'il avait été tué. Le contact fut établi avec elle par Étienne Maignen, historien local qui, après la publication d'un ouvrage sur la guerre à Rennes, poursuivait des recherches sur cette période. Elles vinrent à Saint-Grégoire et Rennes en août 2014 pour le 70 e anniversaire de la Libération et firent ainsi le trajet Maison Blanche - Rennes plusieurs fois, notamment le 4 août, à bord d'une autochenille identique à celle sur laquelle était monté leur père lorsqu'il fut tué le Ier août, sorte de revanche posthume sur le destin qui leur permit de boucler la boucle en sa mémoire. | En 2003 ses trois filles vinrent en France, au mémorial Patton à Avranches, ville à la libération de laquelle leur père avait contribué la veille de sa mort, et au cimetière de Saint-James, où son corps ainsi que ceux de deux de ses camarades disloqués avaient été inhumés ensemble, là où elles pensaient qu'il avait été tué. Le contact fut établi avec elle par Étienne Maignen, historien local qui, après la publication d'un ouvrage sur la guerre à Rennes, poursuivait des recherches sur cette période. Elles vinrent à Saint-Grégoire et Rennes en août 2014 pour le 70 e anniversaire de la Libération et firent ainsi le trajet Maison Blanche - Rennes plusieurs fois, notamment le 4 août, à bord d'une autochenille identique à celle sur laquelle était monté leur père lorsqu'il fut tué le Ier août, sorte de revanche posthume sur le destin qui leur permit de boucler la boucle en sa mémoire. | ||
[[Fichier:DSCN1379.jpeg|250px|right|thumb|Les triplées de Herbert R. Bachant]] | |||
===références=== | ===références=== | ||
<references/> | <references/> |
Version du 12 août 2014 à 23:58
Une triple naissance médiatisée
Un journal du New Jersey annonça, en février 2013, le décès de Muriel Bachant, 90 ans. Elle avait tout juste 22 ans et était maman de triplées de quatre mois quand son mari, Herbert Bachant de la 4e division blindée américaine (4th Armored Division) pendant la Seconde Guerre mondiale fut porté disparu au combat en France, deux mois après le jour J.
« J’espère que les Américains le reprendront aux Allemands lors de notre avance, et j’espère qu’ils le rapatrieront » avait-elle déclaré aux reporters dans son appartement du Bronx en août 1944. « Je ne veux pas qu’on soit tristes pour moi. Je ne suis pas différente de toutes les épouses dont le mari est là-bas à risquer sa vie. »
Muriel avait 15 ans lorsqu’elle rencontra Herbert, fougueux garçon roux, de 1,70 mètres, 65 kilos, à la moustache bien taillée. Il approchait de 30 ans et était conducteur de bus. Ils se marièrent lorsqu'elle avait 19 ans, quelques semaines avant le bombardement japonais de Pearl Harbor et Herbert fut rappelé à l’armée après l’attaque.
Les triplées avaient été conçues en juillet 1943 lors de la visite de Muriel à son mari à sa base d’entraînement au Texas. Herbert fut envoyé par bateau en Angleterre en janvier 1944; les filles naquirent dans un hôpital de New York le 30 mars 1944. Leur arrivée fit sensation à une époque antérieure aux traitements de fertilité qui banalisèrent les naissances multiples Pour complaire aux photographes des média, elle plaça les petites Janet Lee, Nancy Sue et Karen Ann ensemble sur un confortable fauteuil rembourré. Une photographie de l’Associated Press du 27 avril 1944 présente un Herbert Bachant radieux montrant à des copains, lors de manœuvres de pré-invasion en Angleterre, une photo de sa femme et des nouveau-nées. Ceux-ci organisèrent entre eux un défilé militaire pour fêter "l'heureux papa".
Un papa tué devant Rennes
Il n’y eut pas de fin heureuse. Herbert Raymond Bachant, matricule 32090456, ne devait jamais embrasser ses trois filles. L'une d'elles étant gravement malade, la maman avait pourtant envoyé une lettre au général Wood, sollicitant une permission pour son mari, mais celle-ci était parvenue trop tard, lui écrivit ultérieurement le général. La nouvelle arriva qu’Herbert Bachant avait été tué au voisinage de Rennes, le Ier août 1944 lorsque son autochenille fut atteinte à Maison Blanche.[1] Herbert R. Bachant et les six autres membres d'équipage de l'autochenille (halftrack), B-14 dénommée "Belly Button" (nombril), du I0e bataillon d'infanterie blindé, furent tués par un coup direct d'un canon de 88 mm de la batterie allemande cachée derrière des haies alors que leur véhicule était en bordure de la route Betton-Rennes. Deux autres autochenilles et onze chars Sherman aussi engagés sur cet itinéraire, dont le danger avait été pourtant signalé,[2] furent ainsi détruits en même temps à portée de la batterie allemande toute proche. Il fallut attendre encore deux jours avant de voir la libération de Rennes.
Nancy Bachant vit près de Seattle, le Dr Janet Bachant à Manhattan et Karen Sellars en Angleterre. Nancy, qui a recherché l’histoire de la mort de son père, se souvient que sa mère était effondrée mais déterminée à donner une bonne vie à ses filles. Axée sur l’éducation, leur mère, qui comme son mari n'avait suivi que l'enseignement primaire, les fit aller toutes trois, sous le nom de leur beau-père, au collège en Pennsylvanie aux frais de l’Etat. Les triplées apprirent que leur père était mort à la guerre lorsqu’elles eurent environ 4 ans. A 18 ans, elles lui rendirent hommage en reprenant son nom.
Les triplées à Rennes en août 2014
En 2003 ses trois filles vinrent en France, au mémorial Patton à Avranches, ville à la libération de laquelle leur père avait contribué la veille de sa mort, et au cimetière de Saint-James, où son corps ainsi que ceux de deux de ses camarades disloqués avaient été inhumés ensemble, là où elles pensaient qu'il avait été tué. Le contact fut établi avec elle par Étienne Maignen, historien local qui, après la publication d'un ouvrage sur la guerre à Rennes, poursuivait des recherches sur cette période. Elles vinrent à Saint-Grégoire et Rennes en août 2014 pour le 70 e anniversaire de la Libération et firent ainsi le trajet Maison Blanche - Rennes plusieurs fois, notamment le 4 août, à bord d'une autochenille identique à celle sur laquelle était monté leur père lorsqu'il fut tué le Ier août, sorte de revanche posthume sur le destin qui leur permit de boucler la boucle en sa mémoire.
références
↑ le combat du Ier août 1944 à Maison Blanche
↑ Rennes pendant la guerre, chroniques de 1939 à 1945, par Étienne Maignen. éditions Ouest-France - 2013
voir : http://www.fold3.com/page/85984275_herbert_r_bachant/photos/311094706/