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===Un procès à charge, mais des peines minimes…=== | ===Un procès à charge, mais des peines minimes…=== | ||
Le procès se déroule à Rennes dans la matinée du 19 mars 1906 devant le Conseil de guerre de la 10e région militaire, dans la salle des fêtes du Lycée de Rennes nommé aujourd’hui Zola en l’honneur de l’auteur de J’accuse, devant une assistance principalement composée d’une centaine de curieux, de femmes d’officiers, de journalistes dépêchés pour l’occasion et d’avocats. Le service d’ordre est assuré par une compagnie du 41e RI. | Le procès se déroule à Rennes dans la matinée du 19 mars 1906 devant le Conseil de guerre de la 10e région militaire, dans la salle des fêtes du Lycée de Rennes nommé aujourd’hui Zola en l’honneur de l’auteur de ''J’accuse'', devant une assistance principalement composée d’une centaine de curieux, de femmes d’officiers, de journalistes dépêchés pour l’occasion et d’avocats. Le service d’ordre est assuré par une compagnie du 41e RI. | ||
Les officiers accusés disposent d’une solide expérience professionnelle puisque le plus jeune des trois inculpés comptabilise vingt années de service (Charles Spiral), le plus ancien trente (Louis Héry). Les trois officiers choisissent le même défenseur inscrit au barreau de Rennes, Me Jenouvrier | Les officiers accusés disposent d’une solide expérience professionnelle puisque le plus jeune des trois inculpés comptabilise vingt années de service (Charles Spiral), le plus ancien trente (Louis Héry). Les trois officiers choisissent le même défenseur inscrit au barreau de Rennes, Me Jenouvrier. Le général de division Henry Davignon, 60 ans, dispose d’un indéniable prestige, comme en atteste son grade de commandeur de la Légion d’honneur mais l’impartialité des jurés n’est pas – au-delà même de leurs convictions philosophiques – sans poser de question car plusieurs ont une proximité certaine avec l’accusation, mais aussi avec les prévenus. En effet, quelques-uns servent déjà depuis un certain nombre d’années au sein de la 10 e région militaire et ont donc nécessairement eu l’occasion de rencontrer les trois accusés. | ||
Louis Héry ne refuse pas d’obéir à ses supérieurs hiérarchiques mais à une réquisition qu’il juge illégale. En fait, cette affaire est instruite uniquement à charge, la question soulevée au procès étant moins celle de la culpabilité des trois officiers du 47e régiment d’infanterie que celle de la peine à leur infliger. La crise des inventaires est encore assez vive et la réaffirmation de la puissance de l’institution militaire nécessite la restauration du dogme de son infaillibilité, ce qui est incompatible avec la mise en question de la légalité de la réquisition du 23 février 1906. | Louis Héry ne refuse pas d’obéir à ses supérieurs hiérarchiques mais à une réquisition qu’il juge illégale. En fait, cette affaire est instruite uniquement à charge, la question soulevée au procès étant moins celle de la culpabilité des trois officiers du 47e régiment d’infanterie que celle de la peine à leur infliger. La crise des inventaires est encore assez vive et la réaffirmation de la puissance de l’institution militaire nécessite la restauration du dogme de son infaillibilité, ce qui est incompatible avec la mise en question de la légalité de la réquisition du 23 février 1906. | ||
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===…Qui satisfont tout le monde, sauf les officiers=== | ===…Qui satisfont tout le monde, sauf les officiers=== | ||
L’''Ouest-Eclair'' prend acte du jugement mais, bien que fidèle aux institutions, exprime toutefois une certaine proximité bienveillante avec les condamnés. ''La Croix'' indique que ce procès doit décider « non pas seulement de l’honneur de trois officiers, mais de celui de l’armée » Sitôt la nouvelle connue, François Bazin s’intéresse pour Le Salut aux conséquences politiques de ce jugement, non sans verser dans l’antisémitisme : | |||
« C’est une fatalité ; mais les verdicts des Conseils de guerre, et plus particulièrement ceux du Conseil de guerre de Rennes, ont le don de ne pas faire la joie des patriotes de la juiverie parlementaire. A peine connu à la Chambre, le verdict d’hier menaçait d’y soulever un incident de gouvernement. M. Jaurès, qui réclamait jadis avec tant d’impunité l’acquittement d’un traître, s’est naturellement indigné d’un verdict qui ne condamne pas à la peine de mort – au minimum – trois officiers coupables d’avoir refusé de procéder au crochetage d’une porte d’église » | « C’est une fatalité ; mais les verdicts des Conseils de guerre, et plus particulièrement ceux du Conseil de guerre de Rennes, ont le don de ne pas faire la joie des patriotes de la juiverie parlementaire. A peine connu à la Chambre, le verdict d’hier menaçait d’y soulever un incident de gouvernement. M. Jaurès, qui réclamait jadis avec tant d’impunité l’acquittement d’un traître, s’est naturellement indigné d’un verdict qui ne condamne pas à la peine de mort – au minimum – trois officiers coupables d’avoir refusé de procéder au crochetage d’une porte d’église » | ||
Pour le pouvoir, le verdict est exemplaire. Cette dimension tient bien évidemment à la qualité des condamnés, trois officiers disposant de très bons états de service. Mais ce jugement a aussi valeur d’exemple en ce qu’il est clairement un signal lancé aux autres officiers D’un point de vue mémoriel, l’écho du « martyr » de ces trois officiers dont la carrière est brisée nette par cette décision de justice demeura très faible en dehors de quelques cercles catholiques. | Pour le pouvoir, le verdict est exemplaire. Cette dimension tient bien évidemment à la qualité des condamnés, trois officiers disposant de très bons états de service. Mais ce jugement a aussi valeur d’exemple en ce qu’il est clairement un signal lancé aux autres officiers D’un point de vue mémoriel, l’écho du « martyr » de ces trois officiers dont la carrière est brisée nette par cette décision de justice demeura très faible en dehors de quelques cercles catholiques. |
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