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A l'occasion des 80 ans de la libération de Rennes, (re)découvrez l'ensemble des
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« Chronique vezinoise sous l'occupation n°05 » : différence entre les versions

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Ce lieu domine légèrement Rennes, suffisamment toutefois pour apercevoir, un soir avancé qui précédera le départ de l’occupant, différents points lumineux de la capitale bretonne provoqués par les flammes d’incendies de dépôts de ceux qui, nous ayant humiliés en 1940 s’en retournent enfin rejoindre leurs pénates.
Ce lieu domine légèrement Rennes, suffisamment toutefois pour apercevoir, un soir avancé qui précédera le départ de l’occupant, différents points lumineux de la capitale bretonne provoqués par les flammes d’incendies de dépôts de ceux qui, nous ayant humiliés en 1940 s’en retournent enfin rejoindre leurs pénates.


Une fois traversé ''le Tertre'', en direction de  Rennes, la route présente quelques lacets à son point le plus bas. En trottinant avec ma mère je remarque une traction Citroën au fossé abandonnée, dans le sens Rennes-Vezin. Je lui demande ''« c’est à qui l’auto ? »''. Elle me répond qu’elle appartient aux miliciens ''qui devaient être probablement en goguette''. Je pense alors ''« c’est bienfait  pour eux »''. Les miliciens me faisaient tellement peur. En même temps, apercevant le volant, les manettes, les jantes jaunes, j’ai envie d’entrer dans le véhicule. Elle est belle la traction, dame, je ne rencontre presque jamais d’automobiles à part celles des soldats allemands. Même le docteur Léon de Pacé n’a pas d’auto, il se rend à motocyclette chez les patients qu’il visite.
Une fois traversé ''le Tertre'', en direction de  Rennes, la route présente quelques lacets à son point le plus bas. En trottinant avec ma mère je remarque une traction Citroën au fossé abandonnée, dans le sens Rennes-Vezin. Je lui demande ''« c’est à qui l’auto ? »''. Elle me répond qu’elle appartient aux miliciens ''qui devaient être probablement en goguette''. Je pense alors ''« c’est bienfait  pour eux »''. Les miliciens me faisaient tellement peur. En même temps, apercevant le volant, les manettes, les jantes jaunes, j’ai envie d’entrer dans le véhicule. Elle est belle la traction, dame, je ne rencontre presque jamais d’automobiles à part celles des soldats allemands. Même le docteur Léon, de Pacé, n’a pas d’auto, il se rend à motocyclette chez les patients qu’il visite.


Le cœur du village est à nous jusqu’à ''la Belle Épine'', le chemin vert nous y mène.  
Le cœur du village est à nous jusqu’à ''la Belle Épine'', le chemin vert nous y mène.  
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Certains jeux ne sont pas exempts de danger, comme celui, par exemple, de simuler l’abattage d’un bestiau destiné à la boucherie. Encore un spectacle de la vie.
Certains jeux ne sont pas exempts de danger, comme celui, par exemple, de simuler l’abattage d’un bestiau destiné à la boucherie. Encore un spectacle de la vie.
Celui d’un authentique s’est offert à nous avec Albert Pinel qui s’y entend parfaitement. Armé d’un outil ressemblant à un piolet très pointu, il assène un grand coup sur la tète de l’animal qui s’affale, le sang gicle, c’est la vie !… enfin pour ceux qui profiteront de sa viande. Il faut dire qu’à cette époque elle se faisait plutôt rare dans l’assiette du particulier
Celui d’un authentique s’est offert à nous avec Albert Pinel qui s’y entend parfaitement. Armé d’un outil ressemblant à un piolet très pointu, il assène un grand coup sur la tête de l’animal qui s’affale, le sang gicle, c’est la vie !… enfin pour ceux qui profiteront de sa viande. Il faut dire qu’à cette époque elle se faisait plutôt rare dans l’assiette du particulier


Dans le pré de chez Lebastard, nous sommes plusieurs enfants, il doit bien y avoir Gaby, peut-être Alphonse et d’autres. Nous nous positionnons à quatre pattes, les uns derrière les autres, nous singeons des petites bêtes qui se dirigent vers le coup fatal. Le boucher du jour est Bernard, le plus grand. Il est armé d'une barre de fer faisant croix. Il feint d’asséner un violent coup sur la tête. La barre s'arrête un poil au-dessus de la cible et la petite bête s’affale en jetant un petit cri. À chacun son tour pour la tuerie, quand celui de mon frère arrive au moment important où le fer s'abat, il relève soudainement la tête en meuglant pour faire plus vrai. C’est alors la rencontre du fer contre crâne, le choc, des pleurs qui dépassent en intensité sonore les meuglements déjà entendus, il y a beaucoup de sang. Dans ce cas-là on appelle toujours sa maman. Bernard est bouleversé, il prend mon frère par le bras qu’il tient comme pour jouer au side-car. Nous nous précipitons tous en courant vers la maison. Ma mère affolée ne supporte pas la vue du sang. La voisine, madame Blanchard, de Rennes, heureusement présente ce jour là, soigne la plaie, finalement sans gravité. Heureusement Bernard a eu la main plus légère qu’Albert Pinel. On en parle encore. Soixante ans ont passé et Bernard se confond toujours en excuses.
Dans le pré de chez Lebastard, nous sommes plusieurs enfants, il doit bien y avoir Gaby, peut-être Alphonse et d’autres. Nous nous positionnons à quatre pattes, les uns derrière les autres, nous singeons des petites bêtes qui se dirigent vers le coup fatal. Le boucher du jour est Bernard, le plus grand. Il est armé d'une barre de fer faisant croix. Il feint d’asséner un violent coup sur la tête. La barre s'arrête un poil au-dessus de la cible et la petite bête s’affale en jetant un petit cri. À chacun son tour pour la tuerie, quand celui de mon frère arrive au moment important où le fer s'abat, il relève soudainement la tête en meuglant pour faire plus vrai. C’est alors la rencontre du fer contre crâne, le choc, des pleurs qui dépassent en intensité sonore les meuglements déjà entendus, il y a beaucoup de sang. Dans ce cas-là on appelle toujours sa maman. Bernard est bouleversé, il prend mon frère par le bras qu’il tient comme pour jouer au side-car. Nous nous précipitons tous en courant vers la maison. Ma mère affolée ne supporte pas la vue du sang. La voisine, madame Blanchard, de Rennes, heureusement présente ce jour là, soigne la plaie, finalement sans gravité. Heureusement Bernard a eu la main plus légère qu’Albert Pinel. On en parle encore. Soixante ans ont passé et Bernard se confond toujours en excuses.
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Plus qu’un jeu, c’est une distraction que le ciel nous apporte offerte par le déroulement des événements habituels du moment. L’éclatement en l’air des obus lancés par les 8,8cm de la DCA de ''la Belle Épine'' lors de chaque passage d’avions alliés retombent un peu partout. Chaque détonation du canon claque sèchement, acide, brève sans écho bien différent des bruits que provoquent un bombardement. Ce bruit m’impressionne, me gêne sans toutefois m’effrayer. J’entends les éclats tomber sur la toiture d’ardoise de la maison, dégoulinant comme de la grêle, accompagnés de petits tintements clairs. Lorsque l’alerte est terminée nous nous élançons à la recherche de ces petits éclats métalliques. Nos recherches se portent sur les routes là où ils sont le plus visibles. Nous en récoltons de grosseurs plus ou moins importantes et de différentes formes. Nous les comparons entre nous, nous nous les échangeons. ''Lesquels sont les plus beaux?''. Le bord des éclats est souvent acéré.
Plus qu’un jeu, c’est une distraction que le ciel nous apporte offerte par le déroulement des événements habituels du moment. L’éclatement en l’air des obus lancés par les 8,8cm de la DCA de ''la Belle Épine'' lors de chaque passage d’avions alliés retombent un peu partout. Chaque détonation du canon claque sèchement, acide, brève sans écho bien différent des bruits que provoquent un bombardement. Ce bruit m’impressionne, me gêne sans toutefois m’effrayer. J’entends les éclats tomber sur la toiture d’ardoise de la maison, dégoulinant comme de la grêle, accompagnés de petits tintements clairs. Lorsque l’alerte est terminée nous nous élançons à la recherche de ces petits éclats métalliques. Nos recherches se portent sur les routes là où ils sont le plus visibles. Nous en récoltons de grosseurs plus ou moins importantes et de différentes formes. Nous les comparons entre nous, nous nous les échangeons. ''Lesquels sont les plus beaux?''. Le bord des éclats est souvent acéré.


Ces jours là, nous n’allons pas aux abris, les bombes des vagues des bombardiers qui nous survolent très haut aux dessus de nos têtes, ne nous sont pas destinées. Ce n’est qu’un simple passage.
Ces jours là, nous n’allons pas aux abris, les bombes des vagues des bombardiers qui nous survolent très haut au-dessus de nos têtes, ne nous sont pas destinées. Ce n’est qu’un simple passage.


[[Fichier:Flak Belle Epine|vignette|Photo aérienne NCAP 1944 Flak Belle Epine - Vezin le Coquet]]
[[Fichier:Flak Belle Epine|vignette|Photo aérienne NCAP 1944 Flak Belle Epine - Vezin le Coquet]]
Fichier:Ferme La Touche thebault (2).JPG
Fichier:Ferme La Touche thebault (2).JPG


Il semblerait que l'un des tirs de la DCA allemande qui, en fin de compte, nous distrayaient en nous offrant de beaux éclats d'obus, se soit déroulé le 27 juin 1944. Il répondait ce jour là, à une rapide attaque en piqué de l'aviation américaine P51 et P38, sur le champ même de la DCA de la Belle Épine. Nous nommions les P38 «double queue» et les Allemands, qui les redoutaient particulièrement, les appelaient ''«Gabelschwanz teufel»,'' c’est-à-dire ''«Diable à queue fourchue».'' Je me souviens, à d'autres occasions, en avoir vus évoluer dans le ciel, ils nous faisaient grande impression tellement leur forme était atypique.
Il semblerait que l'un des tirs de la DCA allemande qui, en fin de compte, nous distrayaient en nous offrant de beaux éclats d'obus, se soit déroulé le 27 juin 1944. Il répondait ce jour là, à une rapide attaque en piqué de l'aviation américaine P51 et P38, sur le champ même de la DCA de la Belle Épine. Nous nommions les P38 «double queue» et les Allemands, qui les redoutaient particulièrement, les appelaient ''«Gabelschwanz Teufel»,'' c’est-à-dire ''«Diable à queue fourchue».'' Je me souviens, à d'autres occasions, en avoir vus évoluer dans le ciel, ils nous faisaient grande impression tellement leur forme était atypique.
Lors de l'attaque du 27 juin 44, des bombes ont endommagé des bâtiments de la Ferme de la Touche Thébault. Propriété appartenant à monsieur Yves de la Blanchardière, monsieur et madame Joseph Primault en étaient les fermiers. On distingue sur la photo aérienne deux impacts, confirmés par des experts sur un croquis qui accompagne un dossier d'indemnisation d'après guerre.
Lors de l'attaque du 27 juin 44, des bombes ont endommagé des bâtiments de la ferme de la Touche Thébault, propriété appartenant à monsieur Yves de la Blanchardière, monsieur et madame Joseph Primault en étaient les fermiers. On distingue sur la photo aérienne deux impacts, confirmés par des experts sur un croquis qui accompagne un dossier d'indemnisation d'après guerre.
Les Allemands avaient pris possession d'une partie de la propriété le 10 mars 1943 pour y installer leurs canons.
Les Allemands avaient pris possession d'une partie de la propriété le 10 mars 1943 pour y installer leurs canons.




Cette information résulted'une enquête récente effectuée par Monsieur Cédric Levin du cabinet d'Etude en sécurité Pyrotechnique. Le Masters. Qu'il en soit remercié.
Cette information résulte d'une enquête récente effectuée par Monsieur Cédric Levin du cabinet d'Etude en sécurité Pyrotechnique. Le Masters. Qu'il en soit remercié.




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