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(René Tigier, respect) |
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Née à Plélan-le-Grand, précisément à quelques mètres de la route de Lorient, ma grand-mère, arrivant à Rennes après son mariage, devait investir préférentiellement le sud-ouest de la ville. Elle restera fidèle à ce secteur lors de son second mariage, avec Alfred Cosson, en achetant une maison en vis-à-vis de l'église Saint-Yves, là encore ''aux premières loges'' en bordure de la [[rue de Nantes]], [[rue Brossolette]], donc en [[Saint-Jacques-de-la-Lande]] ; maison détruite dans les années 2000 pour l'extension du centre commercial. | Née à Plélan-le-Grand, précisément à quelques mètres de la route de Lorient, ma grand-mère, arrivant à Rennes après son mariage, devait investir préférentiellement le sud-ouest de la ville. Elle restera fidèle à ce secteur lors de son second mariage, avec Alfred Cosson, en achetant une maison en vis-à-vis de l'église Saint-Yves, là encore ''aux premières loges'' en bordure de la [[rue de Nantes]], [[rue Brossolette]], donc en [[Saint-Jacques-de-la-Lande]] ; maison détruite dans les années 2000 pour l'extension du centre commercial. | ||
Les notes qui suivent proviennent pour l'essentiel d'une dizaine de lettres de sa main : les seules conservées de | Les notes qui suivent proviennent pour l'essentiel d'une dizaine de lettres de sa main : les seules conservées de toutes celles qu'elle a envoyées à son "Petit mari"<ref>René Tigier mesurait 1,56 m à 18 ans.</ref> ou "René chéri" ou "Petit chat" mobilisé depuis septembre [[1939]] jusqu'à son décès entre le 11 et le 17 juin 1940, ''mort pour la France'' à Jouy-sous-les-Côtes, dans la Meuse. Elles ont été complétées par quelques-unes des 90 lettres de mon grand-père en retour, dont celles écrites au verso des précédentes ; économie qui leur a valu de revenir à leur destinataire et d'être conservées. Ces lettres mettaient ordinairement deux jours pour parvenir à leur destinataire. | ||
==Des forges à l'arsenal== | ==Des forges à l'arsenal== | ||
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== L'arsenal au printemps 1940 == | == L'arsenal au printemps 1940 == | ||
La première évocation de l'arsenal, dès la première lettre, celle du ''mardi soir'' 6 février 1940, conservée par la réponse du 9, est déjà un peu absconse : ''moi hier, j'ai tiré un peu dure à travailler ; j'avais dormi de 3 h à 4 h 1/2 aussi j'ai trouvé mon lit bon à 7 heures hier soir - et toi tu devais être aussi bien fatigué - moi j'ai repris mon petit boulot, chacun fait le sien. Maintenant, il y a eu des histoires : Leroux m'a dit que je ne serais payé que trois jours ; c'est malheureux à une journée près.'' Le mot fatigue est une des allusions au voyage de retour au front après une permission, une autre étant que mon grand-père a oublié sa | La première évocation de l'arsenal, dès la première lettre, celle du ''mardi soir'' 6 février 1940, conservée par la réponse du 9, est déjà un peu absconse : ''moi hier, j'ai tiré un peu dure à travailler ; j'avais dormi de 3 h à 4 h 1/2 aussi j'ai trouvé mon lit bon à 7 heures hier soir - et toi tu devais être aussi bien fatigué - moi j'ai repris mon petit boulot, chacun fait le sien. Maintenant, il y a eu des histoires : Leroux m'a dit que je ne serais payé que trois jours ; c'est malheureux à une journée près.'' Le mot fatigue est une des allusions au voyage de retour au front<ref>Saint-Fergeux, petite commune du département des Ardennes. Il neige en ce mois de février.</ref> après une permission, une autre étant que mon grand-père a oublié sa ''cravate caquis''... Mais, la fatigue pouvait avoir d'autres motifs, notoirement plus doux que les tressautements incessants des wagons de permissionnaires, la séparation s'avérant bien pénible : ''mon pauvre petit, je n'en suis pas encore revenu ; que c'est tout de meme dure de ce séparer ; il faut y passer pour savoir. Fait attention à ta toux et met toi des ricolo - moi je tousse aussi un peu, j'ai mis un cataplasme.'' La réponse du 9 montre chez le combattant une certaine acrimonie à l'égard de Bretons ou Rennais : Je suis bien content que cela débale par chez nous ; ils en ont profitter assez - cela leur fera un peu voir et les derniers parti ne seront peut être pas mieu que les dernier'' [sic]. Il doit s'agir d'un écho au propos de sa femme : ''M. La---gne a reçu sa feuille de route pour partir ; il va au Mans ; ça va peut etre deguerpir par la, il commence à etre temps''. | ||
La seconde lettre, du 27 février, est entièrement consacrée à des décès, se lamentant même : ''On n'entend parler que de decès''. Elle relève à ce sujet un crime survenu à quelques rues de là : ''[[Rue Lobineau]], il y a eu un drame : un permissionnaire a pris sa femme en faute - il a du tuer le type, mais les journaux en n'ont pas parlé. C'est un café qui fait le coin de la [[rue Ginguené]]. C'est du beau. Ce n'est que le commencement, ce n'est pas la fin.'' | |||
Elle ajoute : ''La mere Hinet a mis le litre de cidre à 28 sous et sous peu à 1 [franc] 50. Je te dis qu'elle n'est pas longtemps à majorer les prix.'' | |||
Il semble qu'elle travaille de nuit en commençant à 15 h 30. | |||
Dans la troisième lettre, du jeudi 28 mars, ma grand-mère, bien morose, ne craint pas de faire état de son "cafard" : elle se termine un peu ''gravement'' par : ''Ta petite épouse qui t'aime et t'attend.''. La lettre en réponse sera d'ailleurs bien chaude, pas seulement en raison de la météo devenue souriante. Elle dit aussi sa maison pleine, et qu'elle n'a pu faire ce qu'elle avait prévu, en raison de cet afflux de visites, amicales ou familiales. On y trouve la seconde allusion à des costumes de laine en provenance du secteur de Guer/Plélan : ''Hier, j'ai eu la visite de ma tante et de Rosalie [Tigier, belle-soeur]. Elles m'ont apportés les costumes. J'en ai pris 2 pour moi à ce prix là. Les lainages sont d'un prix fou : un pour Me Monnerais et l'autre pour Me. Bouillez. Mme. Louessard en voudrait aussi ; je vais tacher de lui en faire avoir un.'' ajoutant : ''Sur le journal, je viens de voir que l'on va avoir 10 [francs] pour l'allocation militaire. On n'aura pas de trop, car la vie est bien chère". | |||
== Notes et références == | == Notes et références == |
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